Toute la semaine, Francis Vailles se penche sur la Finlande, une nation dont les parallèles avec le Québec sont frappants.

En me rendant à la rencontre, j'ai croisé deux employées de l'Université de Helsinki, en pause. Je leur ai demandé quelle question elles souhaiteraient poser au président de la Finlande, Sauli Niinistö, si elles avaient le choix.

Leur réaction fut spontanée. Elles voulaient entendre le président se prononcer sur la décision du Parlement, la veille, de construire une centrale nucléaire à Hanhikivi, située à 7 heures de route au nord de Helsinki. C'est que le projet, fort contesté, est réalisé en partenariat avec la société d'État russe Rosatom. La firme russe fournit les réacteurs nucléaires.

Compte tenu des sanctions occidentales contre la Russie, auxquelles prend part la Finlande, le dossier est explosif. Les Verts de Finlande ont annoncé qu'ils quittaient la coalition gouvernementale au terme du vote favorable. Ce départ ne laisse plus qu'une faible majorité de députés au gouvernement en place.

«Cette activité ne fait pas partie des sanctions contre la Russie, a répondu M. Niinistö en entrevue. Et ce n'est pas dans mes responsabilités de me prononcer sur les questions d'énergie et d'économie. Je laisse au gouvernement les calculs à faire concernant l'utilité ou non du projet.»

Pouvoirs limités

En vertu de la Constitution, le président de la Finlande n'a pas réellement de pouvoirs exécutifs. Il dirige les politiques étrangères et la sécurité, notamment, en coopération avec le gouvernement en place. Il ne peut pas imposer un veto sur la construction de la centrale, par exemple.

En entrevue, il fait tout de même valoir que le projet, mené par des entreprises privées finlandaises, avait vu le jour avant l'invasion de la Crimée et les tensions entre l'Ukraine et la Russie.

À ce sujet, il craint que les tensions en Ukraine durent longtemps. Il voit d'un mauvais oeil la montée des nationalistes en Russie, qui a pour effet de pressuriser le président de la Russie, Vladimir Poutine.

Cependant, il ne croit pas que Vladimir Poutine veuille par ailleurs étendre ses frontières pour revenir à celles de l'ex-Union soviétique, comme le craignent certains. Et il n'est pas inquiet pour l'intégrité du territoire finlandais, qui partage une frontière de 1340 km avec la Russie. «Les frontières sont calmes», dit-il.

Le président a été ministre des Finances au milieu des années 90, lorsque le pays a traversé une grave crise économique qui a mené à d'importantes réformes. Aujourd'hui, il juge que la population ne saisit pas l'importance des mesures à prendre pour retrouver le droit chemin, mais il demeure confiant. «Dans l'histoire, nous avons traversé plusieurs périodes difficiles et nous avons toujours su remonter la pente», dit-il.

Délégation au Canada

Entre le 8 et le 10 octobre, le président viendra au Canada avec une délégation de gens d'affaires de la Finlande.

La délégation est dirigée par Matti Lievonen, président du géant finlandais Neste Oil, qui raffine le pétrole et en fait la vente au détail, entre autres. La délégation sera aussi accompagnée d'une brochette de ministres (Environnement, Économie, etc.). Les rencontres se dérouleront à Ottawa et à Toronto. Rien n'est prévu au Québec et il n'a pas été possible de savoir si des entreprises du Québec prendront part à certaines rencontres à Toronto.

Les Finlandais veulent proposer aux entreprises canadiennes leur expertise dans divers domaines, notamment dans tout ce qui concerne le froid. Ils veulent aider les entreprises minières canadiennes pour leurs projets dans le Nord, mais aussi celles actives dans le transport maritime dans la région arctique.

Par exemple, ils ont un grand savoir-faire dans le bris des glaces arctiques et le design de navires. L'Arctique devient de plus en plus praticable, avec le réchauffement de la planète, et il est maintenant possible pour les navires d'utiliser ce corridor pour se rendre en Asie et de réduire la navigation de plusieurs semaines. En entrevue, Matti Lievonen m'explique d'ailleurs que son entreprise emprunte ce chemin, durant les mois chauds, pour le transport de pétrole depuis déjà deux ans.

Autre secteur de prédilection: les technologies propres. Par exemple, Neste Oil fait environ 10% de son chiffre d'affaires de 25 milliards US dans les biocarburants, dit M. Matti.

Ce carburant est fabriqué à partir d'huile de cuisson recyclée, de déchets de graisse animale et d'huiles végétales industrielles, entre autres. «Ma voiture roule à 100% avec cette énergie renouvelable», dit-il.