L'Italie a vu s'envoler mercredi ses espoirs d'une sortie de crise rapide avec l'annonce d'un nouveau recul de son PIB qui la renvoie en récession pour la 3e fois en moins de 10 ans et embarrasse le gouvernement de Matteo Renzi.

Le Produit intérieur brut de l'Italie a baissé de 0,2% au deuxième trimestre 2014 par rapport au précédent, une performance en deçà des attentes des économistes. Le PIB ayant déjà reculé de 0,1% au premier trimestre, l'Italie se trouve donc techniquement en récession.

Il s'agit d'un grave revers pour Matteo Renzi, qui comptait sur le retour de la croissance pour boucler son budget, combattre le chômage et tenter de contenir la gigantesque dette du pays (plus de 2000 milliards d'euros).

L'annonce a été très mal reçue à la Bourse de Milan. Le principal indice boursier, le FTSE Mib, a plongé de plus de 3% en matinée et reculait encore de 2,37% peu avant la clôture.

Les chiffres de mercredi «sont un coup sévère pour Matteo Renzi et son parti, qui ont traîné à mettre en place des réformes macroéconomiques importantes et se sont occupés à la place de politique. Pendant ce temps, l'Espagne fait honte à l'Italie» avec sa croissance en accélération, note Azad Zangana, économiste de Schroders.

«La reprise en zone euro démarrée au printemps de l'année dernière et qui s'est progressivement étendue à presque toute la zone n'a pas pris en Italie», constate aussi Christian Schulz, économiste de Berenberg.

La crise ukrainienne a «peut-être joué un modeste rôle» en raison des liens énergétiques et commerciaux liant l'Italie à la Russie, «mais la plus grande partie des difficultés provient du pays lui-même», souligne-t-il.

L'Italie entre ainsi dans sa troisième phase de récession depuis 2007. Elle n'a par ailleurs connu depuis la mi-2011 qu'un seul trimestre de modeste croissance, avec une hausse de 0,1% du PIB au 4e trimestre 2013. Elle a vu son PIB reculer successivement de 2,5% en 2012 et de 1,9% en 2013.

Et une performance négative sur l'ensemble de 2014 n'est désormais plus à exclure, notent plusieurs économistes. Le gouvernement italien, le FMI et la Banque d'Italie ont tous récemment revu leurs estimations à la baisse, entre +0,2 et +0,8%, mais pourraient devoir les réajuster une nouvelle fois à la lumière de ces nouveaux développements.

«Ca ne dépend que de nous»

M. Renzi lui-même a admis que les chiffres publiés mercredi étaient «négatifs», mais ajouté que «l'Italie a tout ce qu'il faut pour sortir de la crise. Mais elle doit changer», a-t-il jugé dans une lettre aux députés de la majorité.

Le ministre de l'Économie Pier Carlo Padoan a reconnu de son côté que l'Italie se trouve «dans une phase de sortie de la récession très pénible car la récession est vraiment profonde». Il n'est cependant «absolument pas question» selon lui que la «troïka» (les experts UE-BCE-FMI, NDLR) vienne reprendre les rênes des finances italiennes.

«Le pays doit se réformer tout seul et il est en train de le faire. Nous devons le faire encore plus vite», a-t-il lancé dans une interview à Il Sole 24 Ore. Et de promettre: le seuil des 3% de déficit public/PIB «ne sera pas dépassé en 2014, ni en 2015.»

Interrogé sur les chiffres italiens, le porte-parole du commissaire européen aux Affaires européennes, Simon O'Connor, a toutefois laissé transparaître une certaine préoccupation: ces performances décevantes «pourraient avoir un impact négatif sur les finances publiques», a-t-il souligné, tout en admettant qu'il «est trop tôt pour revoir notre prévision de déficit pour 2014».

M. Renzi a une nouvelle fois exhorté la classe politique italienne à accepter les réformes: «Si d'ici mille jours l'Italie a un système de justice civile efficace (...), un fisc plus simple et moins avide, une administration publique numérisée et efficace et un marché du travail plus clair et avec moins d'idéologie, l'Italie pourra recommencer à croître. (...) Mais ça ne dépend que de nous».