Le Royaume-Uni se démarque de façon spectaculaire du peloton européen avec un faible chômage, une consommation solide, des prix immobiliers en forte hausse... Et ça ronronne sous le capot: l'industrie automobile vit une véritable renaissance.

Dans certains pays industrialisés, il suffit de jeter un coup d'oeil «sous le capot» de l'économie pour évaluer la santé du patient. La raison: quand le secteur automobile va, tout va.

Or, ces jours-ci, les usines de Jaguar, Mini et autres constructeurs actifs au Royaume-Uni ronronnent comme une luxueuse «12 cylindres» réglée au quart de tour. Production en hausse, des milliards d'investissements, des embauches... tout baigne dans l'huile.

Et au dire du Fonds monétaire international, il en va de même pour l'ensemble de l'économie de Sa Majesté.

Mardi dernier, le FMI a révisé à la hausse sa prévision de croissance de l'économie britannique cette année, à 2,9% (+0,2%) - la meilleure performance attendue du G7.

Le même jour, on apprenait que la production industrielle du pays a enregistré en février sa plus forte hausse depuis 2010, à +0,9%, soit trois fois les prédictions des économistes. En y regardant de près, on réalise que l'un des moteurs de l'industrie est le secteur automobile, qui vit une véritable renaissance.

Au plus haut depuis six ans, la production de véhicules - même sans marque de propriété britannique - devrait supplanter celle de la France d'ici 2017 et se rapprocher du niveau du leader européen, l'Allemagne.

Renaissance

C'est un retournement spectaculaire, à l'image de toute l'économie britannique.

Pourtant, après l'effondrement de l'empire British Leyland (MG, Austin, Rover) durant les années 80-90, Londres semblait avoir abandonné l'automobile.

On a bradé les plus belles marques au fil des ans, essentiellement aux Allemands (Rolls-Royce, Bentley, Mini) et aux Indiens (Jaguar, Land Rover). Mais le Royaume-Uni a aussi sauvé l'essentiel: les usines.

Une bonne idée. Car, avec des investissements de plusieurs milliards par les acheteurs et des gains de productivité, les Anglais sont devenus des sous-traitants majeurs pour les constructeurs étrangers. Cela inclut les marques citées plus haut, mais également le japonais Nissan qui, notamment, détient à Sunderland (nord-est de l'Angleterre) l'usine la plus performante du groupe.

Au total, la production automobile anglaise a dépassé la barre des 1,5 million de véhicules en 2013 - un sommet depuis 2007, affirme l'Association nationale des constructeurs et des vendeurs d'automobiles (SMMT).

Et ça continue. D'après les experts cités par la SMMT, la production atteindra un record de 2 millions d'unités d'ici 2017. Le pays deviendra ainsi le deuxième producteur européen, derrière l'Allemagne.

Les usines de Mini (BMW) et Jaguar (Tata) tournent presque à plein régime ces jours-ci, alors que leurs propriétaires ont investi plus de 3 milliards de dollars sur 10 ans pour moderniser ces installations.

«Nous avons changé presque toutes les pièces de la chaîne de montage», affirme Harald Krüger, directeur de la production chez Mini-BMW, à l'usine d'Oxford, dans un entretien avec The Telegraph.

Résultat: cette industrie, qui avait licencié des milliers de travailleurs durant les années 90, emploie aujourd'hui 150 000 personnes, soit 6% des 2,5 millions d'emplois du secteur manufacturier.

L'auto contribue ainsi à maintenir le taux de chômage national tout juste au-dessus de la barre des 7%, l'un des plus faibles d'Europe.

Encore fragile

Malgré sa relance, la production manufacturière britannique reste inférieure de 8% à son pic du début de 2008.

Et même si la consommation s'est redressée cette année, après une fin 2013hésitante, l'économie est surtout tirée par l'immobilier et le crédit. De quoi inquiéter les experts, qui croient la reprise encore fragile.

Les prix des maisons se sont envolés de 8,4% en 2013 grâce surtout aux généreux programmes d'accès à la propriété du gouvernement. Et les économistes tablent sur une nouvelle hausse de 10% cette année, au point qu'on craint une bulle immobilière.

Le danger, c'est qu'une hausse des taux d'intérêt - ce que la Banque d'Angleterre compte faire éventuellement - risque de tuer la reprise dans l'oeuf.

Investissements

Entre-temps, l'industrie automobile, elle, ne regarde plus derrière et passe à la vitesse supérieure.

Jaguar Land Rover va injecter 2,5 milliards de dollars cette année dans son usine de Solihull, dans le centre de l'Angleterre, pour fabriquer des futurs châssis en aluminium. De quoi créer 1700 emplois. Nissan a annoncé que sa marque de luxe, Infiniti, serait construite au Royaume-Uni à partir de 2015.

En somme, plusieurs bonnes nouvelles qui font presque oublier la sévère cure d'austérité et les compressions dans les programmes sociaux que le gouvernement conservateur de James Cameron a imposées aux Anglais ces dernières années.

Production de véhicules*

1. Nissan: 480 500

2. Land Rover: 238 200

3. Mini: 191 500

4. Vauxhall: 138 000

5. Toyota: 128 000

* En 2013

Les emplois:

1. Jaguar Land Rover: 20 000

2. Ford: 7250

3. BMW Group: 5960

4. Nissan: 5000

5. Toyota: 4530

Sources: SMMT, The Telegraph