La Chine a vu ses exportations et importations reculer nettement en mars, à rebours des prévisions des marchés, selon les chiffres publiés jeudi par les douanes, qui ont mis en avant une concurrence internationale accrue et des «frictions» avec ses partenaires commerciaux.

Les exportations de la deuxième économie mondiale ont baissé de 6,6% sur un an le mois dernier, à 170,1 milliards de dollars, tandis que ses importations chutaient de 11,3% sur un an, à 162,4 milliards de dollars.

Ces chiffres sont très en deçà des prévisions du panel de 16 analystes interrogés par l'agence Dow Jones, qui tablaient sur des progressions de 4,2% des exportations et de 2,8% des importations.

La Chine a au final enregistré en mars un excédent commercial de 7,71 milliards de dollars, après un déficit commercial surprise de près de 23 milliards en février --le premier depuis 11 mois sur fond de congés du Nouvel An lunaire.

Les statistiques décevantes de mars constituent cependant un nouveau signal d'alarme pour la Chine, alors que son activité manufacturière se contracte depuis plusieurs mois et que la consommation intérieure piétine.

--Frictions commerciales--

L'administration des douanes a elle-même reconnu jeudi les vents contraires auxquels est confronté le commerce extérieur du géant asiatique.

«La Chine voit ses avantages compétitifs éclipsés par des facteurs négatifs, dont la concurrence montante des pays voisins et des frictions commerciales avec ses principaux partenaires», a commenté un porte-parole, Zheng Yuesheng, dans une allusion aux contentieux en cours avec les États-Unis et l'Union européenne.

Sur les trois premiers mois de l'année, les exportations ont reculé de 3,4% par rapport à la même période de l'an dernier, et les importations ont progressé d'un maigre 1,6%, tandis que l'excédent commercial fondait à 16,7 milliards de dollars contre 43,1 milliards un an auparavant.

«Mais il reste encore possible de concrétiser notre objectif d'une hausse annuelle de 7,5% de notre commerce extérieur» en 2014, a poursuivi M. Zheng, cité dans un communiqué, assurant que le repli du premier trimestre sera «temporaire».

De leur côté, les analystes faisaient également preuve d'une grande prudence, rappelant les surfacturations massivement pratiquées l'an dernier par les entreprises exportatrices, désireuses de camoufler ainsi des flux de capitaux spéculatifs.

Ce phénomène «a gonflé artificiellement la base de comparaison», ce qui relativise les baisses annoncées, ont averti Liu Li-Gang et Zhou Hao, experts de la banque ANZ.

«Si on prend en compte ce problème des surfacturations», que Pékin s'était appliqué à endiguer à la mi-2013, «la véritable croissance des exportations pourrait avoir été de 5% ou 8% sur un an en mars», abonde Zhang Zhiwei, analyste de Nomura.

--Une demande intérieure morose--

Mais chez ANZ, on notait également le tableau «peu enthousiasmant» de la demande chinoise de matières premières, et ce en dépit d'un bond de 14,6% sur un an des importations de minerai de fer.

De l'avis général, la détérioration des importations, symptôme d'une demande intérieure morose, devrait rester source de préoccupation.

«Les importations devraient rester relativement contenues (dans les prochains mois), car le ralentissement des investissements va probablement plomber les importations de matières premières et de biens d'équipement», a souligné Julian Evans-Pritchard, expert de Capital Economics.

Certes, le mini-plan de relance adopté la semaine dernière par Pékin, via des exemptions fiscales et des programmes de rénovation urbaine, a un peu rasséréné les marchés.

Mais si les autorités disent «avoir les moyens de faire face aux écueils», il ne faut pas s'attendre dans l'immédiat à de nouvelles mesures significatives de soutien à l'économie, a prévenu jeudi le premier ministre Li Keqiang.

«Nous n'allons pas (à nouveau) recourir à des mesures de stimulation à court terme au gré des fluctuations de l'économie (car) nous attachons de l'importance aux développements de fond à moyen et à long terme», a-t-il expliqué depuis le Forum asiatique, à Bo'ao.

Pékin affiche depuis l'an dernier son intention de réorienter le modèle économique chinois vers la consommation intérieure, au détriment des investissements dans les infrastructures et d'un secteur industriel en sévère surcapacité --mais tout en soutenant la croissance du pays.

Le pays a enregistré en 2013 une croissance économique de 7,7%, reproduisant sa performance de 2012 --la plus faible depuis 13 ans--, et le gouvernement s'est fixé pour 2014 un objectif de 7,5%.