La Banque centrale européenne (BCE) devrait jouer l'équilibriste, entre situation économique qui s'améliore en zone euro et volonté de rassurer sur la poursuite de sa politique monétaire accommodante, lors de sa réunion qui se tiendra exceptionnellement mercredi et à Paris.

Malgré une activité privée qui a continué de progresser en septembre et une confiance économique à son plus haut niveau depuis deux ans, les responsables de la BCE ont à coeur d'insister sur le caractère fragile de cet élan, son président Mario Draghi en tête.

L'institution monétaire de Francfort «veut éviter» que des propos trop optimistes conduisent les marchés à anticiper une hausse de ses taux, «qui mettraient en péril la reprise», souligne Michael Schubert, économiste de la banque Commerzbank.

M. Draghi devrait en conséquence répéter, comme il le fait sans relâche depuis le mois de juillet, l'engagement de la BCE à maintenir ses taux d'intérêt à leur niveau bas actuel aussi longtemps que nécessaire, voire à les baisser encore. Le principal taux directeur avait été porté à 0,5 % en mai, un plus bas historique.

Mais cette tentative de piloter les attentes des investisseurs (ou forward guidance) suffira-t-elle à convaincre, s'interrogent les analystes alors que de son côté la Réserve fédérale américaine (Fed) hésite depuis des mois entre l'envie de ralentir son soutien à l'économie américaine et le souci de la réaction provoquée.

«La BCE souffre actuellement des décisions de la Fed», souligne Carsten Brzeski, d'ING. Alors que la crainte d'une baisse des injections de liquidités de cette dernière a d'abord fait grimper les taux sur le marché monétaire, le fait qu'elle ait finalement décidé la semaine dernière de maintenir ses rachats d'actif au même niveau a renchéri l'euro, constate-t-il.

Une nouvelle baisse de taux semblant exclue en raison de la meilleure tenue des indicateurs économiques, reste pour la BCE la possibilité d'une nouvelle injection de liquidités, au travers d'un nouveau prêt à long terme aux banques (LTRO).

Lundi, M. Draghi a déclaré que la BCE était prête à faire ce geste, si le niveau des taux le nécessitait. Lors de ses deux précédents LTRO -en décembre 2011 et février 2012- la BCE avait prêté plus de 1 000 milliards d'euros à taux fixe et pour trois ans aux banques de la zone euro, dont une grande partie a déjà été remboursée.

Toutefois, cet outil n'est sans doute pas adapté pour résoudre le problème du financement des PME de la région, relève Michael Schubert. Les derniers chiffres publiés par la BCE jeudi montrent que le recul des crédits octroyés aux entreprises par les banques s'est encore amplifié en août même si une légère amélioration a été observée dans les pays en difficulté du sud.

Le vice-président de la BCE Vitor Constancio et Benoît Coeuré, membre du directoire, se sont d'ailleurs depuis employés à calmer les attentes, affirmant que la BCE n'avait discuté d'aucun instrument spécifique et qu'il n'y avait pas urgence à injecter de nouvelles liquidités.

Si nouveau LTRO il y a, les analystes ne l'attendent donc pas avant plusieurs mois, peut-être début 2014, à un an de l'échéance de celui accordé en 2012.

«En substance, le président de la BCE ne devrait annoncer aucune nouveauté» ce mois-ci, à l'issue d'un conseil des gouverneurs avancé à mercredi pour cause de Fête nationale allemande jeudi, résume Thilo Heidrich, de Postbank. La réunion aura lieu à Paris, selon la tradition qui voit la BCE délocaliser deux fois par an ses réunions à travers la zone euro.

En revanche, des informations sont attendues sur la future publication des compte rendus de la BCE, qui a été décidée cet été. M. Draghi a promis d'en donner les détails à l'automne.