Les pays des BRICS se sont réunis jeudi pour porter la voix des économies émergentes au sommet du G20 et rappeler aux pays riches leur responsabilité dans la tempête financière qu'elles traversent actuellement.

La réunion des chefs d'État du Brésil, de Russie, d'Inde, de Chine et d'Afrique du Sud a été ouverte peu après 11h00 GMT (7h00 à Montréal) par Vladimir Poutine, accompagné de ses ministres des Affaires étrangères, Sergueï Lavrov, et des Finances, Anton Silouanov.

L'objectif de la rencontre est de mettre au point «une approche commune concernant les principaux sujets du sommet du G20», qui doit s'ouvrir plus tard dans la soirée, a expliqué le chef de l'État russe.

Les cinq pays des BRICS, qui représentent plus du quart des richesses et 40% de la population de la planète, cherchent à s'afficher en chefs de file des économies émergentes, devenues pendant l'été une source d'inquiétude majeure.

«L'économie mondiale est dans une situation bien plus stable qu'il y a cinq ans», à la création du G20, a observé jeudi la conseillère du Kremlin, Ksénia Ioudaéva.

La croissance se renforce dans la plupart des pays riches, l'Europe est sortie de récession mais «il existe des risques liés à la fin des mesures de relance aux États-Unis», a-t-elle averti.

Conséquence du projet de la banque centrale des États-Unis de réduire son soutien à l'économie, les monnaies émergentes piquent du nez. La roupie indienne a perdu environ le quart de sa valeur depuis le début de l'année, le réal brésilien 15%, la lire turque plus de 11%, le rouble russe 10%, poussant les autorités monétaires de ces pays à engager des sommes considérables sur les marchés pour défendre leur monnaie.

Après avoir inondé le système financier, et notamment les pays émergents, de liquidités, la Réserve fédérale (Fed) se prépare à lever le pied sur son soutien à l'économie.

«Être conscients des répercussions»

Les investisseurs, anticipant une hausse des taux aux États-Unis, y reviennent et les économies émergentes subissent des fuites massives de capitaux qui pèsent sur leurs devises nationales.

Les États-Unis «devraient être conscients des répercussions de leur politique et prendre leurs responsabilités en ce qui concerne la stabilité de l'économie mondiale», a estimé jeudi le vice-ministre chinois des Finances, Zhu Guangyao.

Pour autant, a-t-il ajouté, les BRICS «n'ont pas besoin de plan d'aide» mais de «réformes structurelles» pour affronter le phénomène.

L'Afrique du Sud avait mis en garde lundi contre des décisions «basées sur les seuls intérêts nationaux (qui) peuvent avoir des conséquences graves sur les autres nations».

Côté américain, la sous-secrétaire au Trésor, Lael Brainard, a rappelé que si la politique de la Fed devenait moins généreuse, cela serait «parce que l'économie américaine se renforce, ce qui est clairement positif pour l'économie mondiale».

Selon les experts de la société de recherche IHS Global Insight, 44 milliards de dollars ont quitté les marchés émergents depuis trois mois, et le mouvement ne fait que commencer.

Pour Jan Randolf, économiste chez IHS, le message des BRICS est de «rappeler à l'occident et au FMI leurs responsabilités envers les pays en voie de développement».

«Non seulement les marchés émergents constituent le moteur de la croissance mondiale depuis la crise financière de 2007, mais les afflux de liquidités de l'ordre du millier de milliards de dollars par an qu'ils ont reçus ces dernières années étaient clairement liés à la réaction monétaire des pays occidentaux à leurs propres crises», ajoute-t-il.

Vladimir Poutine a rappelé les avancées obtenues lors de la réunion des BRICS en mars à Durban: la création d'une banque de développement dotée au départ de 50 milliards de dollars pour financer les investissements et des réserves communes de devises de 100 milliards de dollars.

Ces deux outils restent pour l'instant à l'état de projet, faute d'accord sur leur financement, mais la mise sur pied des réserves de devises est «au stade final», a indiqué le président russe.

Ces dernières constitueraient un outil considérable dans lequel pourraient puiser les BRICS pour défendre leurs monnaies sur les marchés. Elles doteraient en outre les pays d'émergents de leur propre FMI, d'autant que la réforme des quotas de l'organisation basée à Washington, censée leur donner plus de poids, semble au point mort.