À quelques heures de la clôture du Sommet du G8, plusieurs organismes lancent un vibrant plaidoyer pour que les plus grandes puissances mondiales mettent fin au secret bancaire.

«Ce sera une honte pour les pays qui refusent de publier un plan d'action sur le sujet au terme des rencontres d'aujourd'hui», a lancé mardi matin Gavin Hayman, directeur de l'organisme Global Witness, en marge du sommet qui se tient à Lough Erne, en Irlande du Nord.

La lutte contre l'évasion fiscale et le secret bancaire constitue l'une des priorités des dirigeants du G8.

Le premier ministre britannique David Cameron --qui préside le G8 cette année-- propose notamment de créer un registre mondial des «propriétaires réels» de sociétés-écran, qui facilitent le blanchiment d'argent. 

Les dirigeants du G8, dont le premier ministre canadien Stephen Harper, indiqueront plus tard aujourd'hui s'ils vont de l'avant avec cette mesure.

«Les criminels sophistiqués n'ouvrent plus de comptes de banque aujourd'hui, ils créent plutôt des sociétés-écran pour cacher leurs activités, et souvent même une série de sociétés-écran qui s'emboîtent comme des poupées russes», a souligné Gavin Hayman pendant une rencontre avec quelques journalistes.

Le directeur de Global Witness a cité plusieurs exemples où de telles entités ont permis à de l'argent sale d'être recyclé, ou encore à de grandes entreprises d'échapper au fisc. 

Le trafiquant d'armes Victor Bout aurait ainsi utilisé un réseau mondial de sociétés-écran pour camoufler ses activités illicites. Les armes vendues par Bout auraient servi dans plusieurs conflits sanguinaires en Afrique.

Échange d'informations

Selon Global Witness, c'est aux États-Unis --principalement au Delaware-- qu'on trouve la plus forte concentration de sociétés-écran, puis ensuite dans les différents territoires offshore de la Grande-Bretagne.

En plus de se prononcer sur la possible création d'un registre des "propriétaires réels", les dirigeants du G8 tenteront aujourd'hui de s'entendre sur la création d'un système mondial d'échange automatique multilatéral d'informations. 

Leur position sera connue en fin d'après-midi, quand le communiqué final du Sommet sera publié. 

«Cette question n'est pas théorique, c'est un enjeu de vie ou de mort pour bien des gens», a indiqué Adrian Lovett, directeur européen de l'organisme One Campain, en marge du sommet mardi matin.

Le Canada montré du doigt

Le Canada est montré du doigt depuis un certain temps déjà pour la mollesse de sa position dans la lutte à l'évasion fiscale. En visite à Dublin avant le Sommet du G8, le premier ministre Stephen Harper a tenté de préciser quelque peu sa position. 

Il a indiqué être d'accord «sur les principes» avec toutes les propositions mises de l'avant par David Cameron, tout en soulignant que la structure décentralisée du Canada pourrait poser des problèmes.

«La seule réserve que nous allons exprimer (au G8) touche l'implantation, a-t-il déclaré dimanche. Au Canada, nous devrons consulter les provinces, car nous sommes un État fédéral.»

Les pressions se font fortes pour que le Canada, ainsi que l'Allemagne et les États-Unis, signent une déclaration commune sur le sujet.

«Si Obama, Harper et (Angela) Merkel bloquent le plan visé par le G8, il s'agira d'une claque au visage pour les entreprises honnêtes et les citoyens déjà surtaxés», a lancé dans un communiqué Alex Wilks, directeur de campagne de l'organisme Avaaz, qui milite sur cette question.

Avaaz estime que plus de 1000 milliards de dollars US sont placés chaque année dans des paradis fiscaux à l'abri des autorités fiscales, ce qui contribue aux déficits gouvernementaux et au financement du crime organisé.

Stephen Harper -- qui a limité au minimum les contacts avec les journalistes pendant sa tournée européenne précédant le Sommet du G8 -- doit rencontrer les médias à 15h45 (10h45, heure de Montréal) mardi.

Le premier ministre et le reste de sa délégation rentreront ensuite au Canada en soirée, depuis un aéroport militaire de Belfast.

Le Sommet se déroule dans la campagne verdoyante d'Enniskillen, sous une très forte protection policière et militaire. Un dispositif qui semble avoir fonctionné, puisqu'à peine quelques centaines de manifestants se sont fait entendre lundi soir.

La question syrienne a dominé les discussions lundi, avec une rencontre en privé entre le président Barack Obama et son homologue russe Vladimir Poutine.

Poutine continue de faire bande à part en soutenant toujours le régime sanguinaire de Bachar al-Assad, responsable de plus de 93 000 morts à ce jour.