Même si le premier ministre britannique David Cameron a avancé cette semaine qu'un accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne (UE) était «proche», son homologue canadien a tenu hier à tempérer les attentes quant à une signature rapide.

En conférence de presse au palais de l'Élysée à Paris, Stephen Harper a encore une fois refusé de fixer un échéancier précis. «Le Canada n'établit pas une date pour une telle entente, je pense qu'une telle approche n'est pas dans notre intérêt», a-t-il déclaré à un parterre de journalistes canadiens et français.

«La réalité est que nous avons des grands gains liés à cet accord, mais c'est nécessaire de négocier à un point où nous sommes convaincus que ce sera dans l'intérêt du Canada», a ajouté M. Harper.

Le président français François Hollande, qui s'est entretenu avec Stephen Harper hier midi avant de rencontrer la presse, a lui aussi voulu modérer les attentes quant à la conclusion rapide d'un accord de libre-échange.

«Nous sommes dans une négociation, a-t-il souligné. Il est bien compréhensible qu'à un certain moment, des obstacles apparaissent, des difficultés surgissent. Nous les connaissons dans plusieurs domaines.»

Selon le président de la République, l'essentiel est d'avoir la «volonté» de trouver un terrain d'entente. Il a salué la décision de Stephen Harper de ne pas précipiter la prise d'une décision.

Les échanges commerciaux entre le Canada et la France s'élèvent à 8 milliards de dollars par année. Selon une étude citée par Stephen Harper, le commerce avec les 27 pays de l'UE pourrait bondir de 20% si un accord de libre-échange était signé.

Marc Touati, économiste français et président du cabinet-conseil ABCDEFI, croit cependant qu'un tel accord risque de profiter davantage au Canada qu'à l'UE, et surtout, qu'à la France.

«C'est très intéressant et très important, mais aujourd'hui, l'euro est beaucoup trop fort, a-t-il avancé à La Presse. On risque d'être les dindons de la farce, et il risque d'y avoir davantage de coûts que d'avantages pour l'Europe.»

La négociation de cette entente constitue l'un des principaux enjeux de la visite européenne entamée mardi par Stephen Harper. Après Londres et Paris, le premier ministre se rendra aujourd'hui en Irlande pour discuter des échanges économiques avec le Canada.

La question du libre-échange sera ensuite abordée au Sommet du G8 qui se déroulera en Irlande du Nord lundi et mardi prochains. Le dossier de l'évasion fiscale occupera aussi une place importante dans les discussions des leaders des plus grandes puissances mondiales.

La conclusion d'un accord entre le Canada et l'UE pendant le Sommet apparaît toutefois très peu probable. Plusieurs points cruciaux restent à régler, notamment au sujet des quotas de boeuf canadien et de produits laitiers européens qui pourraient être échangés.

Syrie et Mali

Questionné par les journalistes au sujet de la découverte de l'utilisation d'armes chimiques en Syrie, Harper a réitéré son souhait de voir le régime de Bachar al-Assad quitter le pouvoir. Il a toutefois exprimé des réserves sur le fait de fournir des armements aux rebelles syriens.

Harper a par ailleurs félicité François Hollande pour l'intervention militaire de la France au Mali il y a quelques mois.

Le premier ministre canadien a aussi annoncé hier le lancement d'un programme de coopération renforcée avec la France. Celui-ci «établira le cadre pour que nos deux pays puissent renforcer leurs excellentes relations économiques, politiques et culturelles, ainsi que les liens qui unissent leurs populations, ce qui jette les bases pour des années de collaboration accrue», a-t-il déclaré.