Le mois dernier, l'agence Associated Press a causé tout un émoi en Asie en suivant durant quelques jours un travailleur de Hong Kong contraint - comme des centaines d'autres - de dormir dans une «cage en métal».

Photos à l'appui, le reportage raconte comment cet homme et ses voisins tentent péniblement de trouver le sommeil la nuit, étendus sur un couvre-sol en linoléum ou en bambou. Les «locataires» de ces cages arrivent ainsi à repousser les punaises et les autres intrus qui, autrement, envahissent les matelas.

Incapables de payer les prix exorbitants pour un logement décent dans cette région autonome chinoise, de plus en plus d'habitants de Hong Kong doivent se résigner à choisir un tel refuge.

Ces microespaces, dans l'une des villes les plus chères de la planète, sont empilés les uns sur les autres pour loger le plus de monde possible. Le loyer d'une cage de 1,5 mètre carré (16 pieds carrés): environ 175$ CAN par mois (1300$HK).

«On ne peut rien y faire. Je dois vivre ici. Je dois survivre», commente un ancien boucher qui a élu domicile dans ces abris grillagés.

Selon une organisation d'aide sociale, ils sont plus de 100 000 à Hong Kong à vivre dans des logements «inadéquats», souvent des appartements subdivisés en petits cubicules en bois ou en métal, sinon dans des abris de fortune sur le toit des immeubles.

C'est l'envers du boom immobilier dans la prospère ex-colonie britannique.

Les prix des logements à Hong Kong ont bondi de 23% en 2012 et doublé par rapport à 2008, provoquant l'indignation d'une grande partie de la population. Même les garages se négocient à prix d'or dans la «perle de l'Orient».

Dans un récent classement régulièrement mis à jour, le magazine The Economist estime que le marché immobilier de Hong Kong est surévalué en moyenne de 64%. Suivent dans l'ordre les marchés de Singapour (surévaluation de 58%), de la Belgique (55%) ... et du Canada (54%).

Vite, on divorce

Or, des situations similaires à celle de Hong Kong se répètent ailleurs en Chine, surtout dans les zones hyperindustrialisées près de la mer.

Avec la pollution alarmante et les iniquités sociales, les coûts élevés du logement alimentent de plus en plus les tensions sociales croissantes dans le pays le plus peuplé du monde, une grande partie des 1,3 milliard de Chinois ne pouvant pas accéder à la propriété.

Depuis deux ans, les autorités ont pris des mesures pour contrer la spéculation immobilière, incluant la restriction du crédit et une remontée des taux d'intérêt. Pour autant, la tendance haussière se maintient.

À Shanghai, une ville très prisée certes, les prix de l'immobilier ont bondi de 41% en moyenne sur un an. Si bien qu'il faut débourser environ 450 000$ CAN aujourd'hui pour un logement de 1000 pieds carrés en banlieue de la ville. Un appartement au centre-ville vous coûtera au moins le double.

«Le gouvernement est incapable de briser le cycle des anticipations qui poussent les prix à la hausse, augmentations qui nourrissent les expectatives», affirme dans une étude l'économiste Mark Williams, de Capital Economics.

Craignant une révolte de la classe moyenne naissante, le gouvernement chinois a donc décidé de prendre les grands moyens en adoptant, la semaine dernière, une taxe de 20% s'appliquant sur la plus-value des ventes d'immobilier. Enfin un remède de cheval capable d'enrayer la spéculation immobilière?

Pas si sûr. Les proprios chinois ne sont pas à court d'imagination pour maximiser leur investissement dans la brique et le mortier.

Selon les médias locaux, la Chine enregistre depuis une semaine une hausse marquée... du nombre de divorces. Le motif de ces ruptures soudaines? C'est une tactique des époux pour éviter la toute nouvelle taxe immobilière.

Une lacune dans la loi permet aux couples possédant deux immeubles de divorcer, de se partager les deux propriétés et d'en revendre au moins une sans impôt.

Le divorce coûte en Chine à peine quelques yuans et les conjoints peuvent se remarier aussitôt après. Une procédure express, donc, qui permet de réaliser des économies de quelques dizaines de milliers de dollars sur la vente d'une maison.

«Je compte vendre mon logement cet après-midi», a confié à un quotidien de Shanghai une femme venant d'obtenir son certificat de divorce. Il faut croire que la passion pour l'immobilier est parfois plus forte que l'amour...

Entre-temps, pas moins du tiers des quelque 7,1 millions d'habitants de Hong Kong résident dans des logements sociaux et 210 000 personnes sont en attente d'un logement.