Le Parlement portugais a adopté mercredi la proposition de budget pour 2013 du gouvernement de centre-droit, tenu d'accentuer la politique d'austérité menée sous la tutelle de ses créanciers et contre laquelle des milliers de manifestants ont aussitôt protesté.

Les seules voix de la coalition gouvernementale ont suffi à approuver le texte en première lecture même si l'ensemble de l'opposition, des socialistes à l'extrême gauche, a voté contre.

Répondant à des appels de mouvements apolitiques et du principal syndicat portugais, la CGTP, quelque milliers de manifestants, parmi lesquels de nombreux fonctionnaires, se sont rapidement rassemblés devant le parlement pour protester contre le renforcement de l'austérité prévu par le budget 2013.

«Réveille toi peuple du Portugal», «Basta la troïka», pouvait on lire sur les banderoles agitées par les protestataires qui ont pris pour cible privilégiée la «troïka» (UE-BCE-FMI) représentant les créanciers du Portugal, sous assistance financière.

«À bas les traîtres!» «honte à vous» ont crié les manifestants lorsque des limousines noires ont quitté le Parlement.

Depuis la mi-septembre quand des centaines de milliers de personnes ont protesté à travers le Portugal contre l'austérité, le mécontentement a connu une forte poussée face à une politique de rigueur qui entraînera l'an prochain un taux de chômage record de 16,4%, selon les prévisions officielles.

La CGTP, qui souhaite étendre la contestation, a appelé à une grève générale le 14 novembre, des actions similaires étant prévues dans d'autres pays européens, notamment en Espagne.

Afin de ramener le déficit public à 4,5% du PIB en 2013, contre un objectif de 5% cette année, l'exécutif compte appliquer un paquet d'austérité d'un montant de 5,3 milliards d'euros, obtenu à 80% par une hausse généralisée des impôts.

Cet effort de redressement correspond à 3,2% du PIB, afin notamment de tenir compte des effets d'une récession économique estimée à 1% du PIB, après le recul de 3% attendu cette année.

«de lourds sacrifices»

La tâche du gouvernement s'annonce donc difficile, malgré l'assouplissement de ses objectifs budgétaires négocié en septembre avec ses créanciers, l'Union européenne et le Fonds monétaire international, dans le cadre du plan d'aide de 78 milliards d'euros accordé au Portugal en mai 2011.

«Le budget est très exigeant et demande de lourds sacrifices aux Portugais», a reconnu le Premier ministre Pedro Passos Coelho. Mais «il sert l'objectif vital de mener à bon port notre programme d'ajustement», a-t-il assuré lors du débat parlementaire consacré à la loi de finances, dont la version définitive sera votée à la fin novembre.

«C'est un budget voué à l'échec», a rétorqué le secrétaire général du Parti socialiste, Antonio José Seguro, dénonçant une «austérité à outrance» et des prévisions économiques trop optimistes.

Ce rejet des socialistes porte un coup dur au consensus qui rassemblait les principales forces politiques autour du plan d'aide international, un atout maintes fois souligné par les bailleurs de fonds du pays.

«Les risques pesant sur les objectifs du programme se sont nettement accrus» et «la résistance politique et sociale à l'ajustement a augmenté», s'inquiétait le FMI la semaine dernière.

De plus en plus isolé, le gouvernement a subi les critiques de nombreux économistes et éditorialistes, y compris d'importantes personnalités de droite, selon lesquels ce budget est trop axé sur la hausse des impôts et aura des effets dévastateurs sur un plan économique et social.

Le Premier ministre a expliqué que ce déséquilibre du côté des recettes découlait du fait que les réductions des dépenses de l'Etat avaient atteint leur limite. Pour «éviter au Portugal de demander un second plan d'aide», M. Passos Coelho a défendu une «réforme ambitieuse» des fonctions de l'Etat, censée couper 4 milliards d'euros supplémentaires dans les dépenses d'ici 2014.

«Seule des mesures d'économie durables éviteront des impôts indésirables», a abondé son partenaire de coalition et ministre des Affaires étrangères, Paulo Portas, invitant les socialistes à contribuer à cette réforme.