L'Espagne est restée en récession au troisième trimestre, a estimé mercredi la banque centrale, alors que le pays souffre de la tension des marchés, le chef du gouvernement affirmant pour la première fois que si celle-ci se poursuit, il demandera un sauvetage.

«Les données disponibles pour le troisième trimestre de l'année suggèrent que le produit intérieur brut a continué à baisser à un rythme significatif, dans un contexte de tension financière toujours très élevée», a indiqué la Banque d'Espagne dans son bulletin mensuel.

Les prévisions de la banque centrale sont généralement confirmées par les chiffres officiels, dont les données provisoires seront connues le 30 octobre.

Une mauvaise nouvelle alors que la quatrième économie de la zone euro souffre d'un regain de tension, les investisseurs semblant s'impatienter devant ses réticences à solliciter son sauvetage financier.

Le chef du gouvernement conservateur Mariano Rajoy a fait un pas dans leur direction, dans un entretien au Wall Street Journal publié mercredi: si les taux d'emprunt de l'Espagne se maintenaient à un niveau «très élevé pendant trop longtemps», mettant en danger l'économie du pays et alourdissant sa dette, «je peux vous assurer à 100% que nous demanderions ce sauvetage», a-t-il dit.

Cette déclaration tranche avec la prudence affichée ces derniers mois par le pays, qui redoute surtout les strictes conditions qui pourraient lui être imposées en échange.

Pour bénéficier des mesures de soutien de la Banque centrale européenne (BCE), qui a promis des achats illimités d'obligations des pays les plus fragiles de la zone euro, l'Espagne doit d'abord demander l'aide des fonds de secours européens, mais assure n'avoir pas encore pris sa décision.

Les marchés commencent à s'impatienter, ce qui a forcé le Trésor à payer plus cher, mardi, pour emprunter près de 4 milliards d'euros en bons à 3 et 6 mois.

Une tension qui se poursuivait mercredi: à 8h50 (heure de Montréal), la Bourse de Madrid chutait de 3,35%, pendant que, sur le marché obligataire, le taux d'emprunt à dix ans de l'Espagne remontait à 5,955%.

Les investisseurs doutent de la capacité du pays à se financer seul, alors que son économie peine à se relever depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008.

Il a renoué avec la récession au dernier trimestre 2011, moins de deux ans après en être sorti, et a vu son PIB reculer de 0,3% au premier trimestre, puis de 0,4% au deuxième.

Au troisième trimestre, la Banque d'Espagne note «la détérioration de la confiance des ménages», mais aussi un recul de «l'indice de confiance du commerce de détail», tandis que le secteur de la construction continue de s'effondrer.

Le gouvernement conservateur table sur un recul du PIB de 1,5% en 2012, puis de 0,5% en 2013, mais ces prévisions sont jugées optimistes par les analystes: le Fonds monétaire international (FMI) prévoit -1,7% en 2012, puis -1,2% en 2013, tandis que Standard & Poor's attend -1,8% en 2012 et -1,4% en 2013.

Il dévoilera jeudi son projet de budget 2013 et un nouveau plan de réformes, un ensemble perçu par les analystes comme l'avant-dernière étape avant de demander le sauvetage financier du pays.

La dernière marche sera franchie vendredi avec la présentation de l'audit indépendant des banques, pour chiffrer l'aide que leur versera la zone euro, qui a promis en juin 100 milliards d'euros. Madrid affirme que 60 milliards seront suffisants.