L'entrée de la Russie dans l'Organisation mondiale du commerce (OMC), ratifiée mardi par la Douma (chambre basse), doit permettre au pays de diversifier et moderniser son économie, au prix selon ses détracteurs d'un coût social élevé.

La Russie, la dernière grande puissance à rester à l'écart de l'organisation, négociait son entrée depuis 18 ans, une durée record.

Car le pays était partagé sur les bénéfices de cette adhésion. Vladimir Poutine, au pouvoir depuis 2000, avait d'ailleurs mis plusieurs fois en garde contre le prix à payer pour en faire partie.

Mais la crise économique mondiale, qui a mis la Russie à genoux en 2008-2009, a fini de persuader les autorités du bien-fondé de cet accès.

«Nous avons épuisé les possibilités de croissance basée sur une hausse importante de la production et l'exportation d'hydrocarbures», qui pour l'heure sont le pilier de l'économie russe, rappelait la semaine dernière Alexeï Portanski, directeur du bureau d'information sur l'adhésion de la Russie à l'OMC.

Il faut «produire et exporter des produits concurrentiels», ajoutait-il.

En intégrant l'OMC, la Russie doit baisser ses droits de douane, qui passeront en moyenne de 9,5% à 6% d'ici à 2015.

Cela doit permettre d'ouvrir un peu plus le marché russe aux produits étrangers et de fait stimuler la concurrence, élément essentiel pour forcer les entreprises à moderniser leur production.

Mais cette mesure inquiète les opposants à l'adhésion, qui craignent que cela signe tout simplement l'arrêt de mort de certaines industries et entreprises héritées de l'époque soviétique - d'autant plus que la Russie devra réduire le montant de ses subventions destinées à soutenir ses producteurs nationaux.

Certains secteurs seront nettement plus affectés que d'autres, et en particulier l'industrie agro-alimentaire, la construction et le génie mécanique, soulignent les analystes de Renaissance Capital dans une étude.

Des faillites et des plans sociaux sont à prévoir, soulignent les détracteurs de l'intégration. Selon eux, d'ici à 2020, ce sont près de 1,9 million d'emplois qui devraient être supprimés.

Les autorités reconnaissent que certains secteurs vont effectivement souffrir, mais soulignent qu'elles ont élaboré une série de mesures pour compenser les risques pesant sur certaines branches.

À l'inverse, le secteur des métaux, l'industrie chimique, les services financiers, les transports et les télécommunications devraient être les principaux bénéficiaires de cette réduction des droits de douane, selon Renaissance Capital.

Les opposants à l'entrée dans l'OMC soulignent par ailleurs que la baisse des droits de douane va représenter un manque-à-gagner pour le budget du pays, malvenu en période de turbulences importantes sur les marchés mondiaux.

Mais selon la Banque mondiale, la Russie gagnera, grâce à l'amélioration de la productivité et de la compétitivité des entreprises, l'équivalent de 3,3% de son produit intérieur brut, soit environ 49 milliards de dollars, dans les trois ans suivant l'intégration à l'organisation.

Et sur 10 ans, elle devrait gagner environ 11% de son PIB, soit 162 milliards de dollars, estime la BM.

Les foyers russes devraient voir leurs revenus augmenter en moyenne de 7,2% par an, indique l'institution.

La baisse des prix stimulera la consommation dans certains secteurs et profitera nettement au consommateur, selon la même source. Selon Natalia Minachkina, une responsable au ministère du Commerce, la baisse des taxes réduira le prix notamment des automobiles et des médicaments.