Le gouvernement espagnol a annoncé jeudi de nouvelles mesures destinées à redresser les comptes du pays, en luttant contre la fraude fiscale et en réduisant le nombre d'entreprises publiques, et a appelé les banques et les régions à assainir leur situation.

Quinze jours après son arrivée au pouvoir et une semaine après un premier plan combinant coupes budgétaires de 8,9 milliards et hausses d'impôts de 6,3 milliards, l'équipe du conservateur Mariano Rajoy veut désormais récupérer près de 8,2 milliards d'euros en visant l'économie souterraine.

Cette dernière engloutirait, selon plusieurs études, près du quart du produit intérieur brut (PIB) espagnol et les différents plans lancés ces dernières années pour la réduire ont eu peu d'effets.

Il s'agit cette fois de renforcer le contrôle dans les entreprises et de «limiter la pratique du paiement en liquide dans certaines transactions», a expliqué la porte-parole du gouvernement, Soyara Saenz de Santamaria.

Il faut aussi «redimensionner le secteur public», a-t-elle estimé, alors qu'il existe actuellement en Espagne «plus de 4000 entreprises publiques et fondations» du secteur public, en grande majorité dans les régions.

«L'objectif fondamental est le contrôle du déficit public», a-t-elle ajouté, car le temps presse: les comptes, à fin 2011, seront très mauvais, avec un déficit pouvant dépasser les 8% du PIB, bien au-dessus des 6% visés, comme l'a avoué lundi le ministre de l'Économie Luis de Guindos.

La Sécurité sociale, notamment, devrait afficher un déficit de 0,06% du PIB alors que l'objectif était un excédent de 0,4%, mettant fin à plus de dix ans dans le vert.

Pour parvenir au déficit public de 4,4% promis pour fin 2012, il faudra trouver près de 40 milliards d'euros, sous forme d'économies ou de nouvelles hausses d'impôts.

Pas question de mettre en danger ce programme, a rappelé jeudi Luis de Guindos, citant les deux principales menaces: le secteur bancaire, fragilisé depuis l'éclatement de la bulle immobilière en 2008 et risquant d'avoir besoin d'argent public, et les 17 régions autonomes, victimes du même phénomène et depuis très endettées.

Dans le cas des banques, «si vous prenez des critères internationaux, comme dans le cas de l'Irlande, au maximum nous parlons d'un besoin de 50 milliards d'euros de provisions supplémentaires», a déclaré le ministre au Financial Times.

«Dans la grande majorité des cas, elles peuvent les fournir elles-mêmes, piochant dans leurs bénéfices», a-t-il ajouté.

Ayant prêté à tout-va, aux promoteurs comme aux ménages, les banques espagnoles ont en effet sur les bras 176 milliards d'euros de crédits problématiques et d'immeubles et terrains saisis, dont la valeur fond constamment.

Autre source de préoccupation pour le gouvernement: les régions, qui disposent de larges compétences, gérant la santé et l'éducation, et d'une grande autonomie financière.

Au troisième trimestre 2011, leur dette cumulée dépassait les 135 milliards d'euros, soit 12,6% du PIB du pays, un record historique.

Signe de cette situation dramatique, l'État espagnol est intervenu ces derniers jours pour aider la région de Valence (est) qui ne pouvait pas payer une dette de quelque 125 millions d'euros envers la Deutsche Bank.

Il va désormais exiger plus de rigueur à ces mauvaises élèves, en approuvant en mars une loi introduisant «un contrôle a priori» de leurs projets budgétaires: «avant d'approuver leur budget elles devront obtenir le feu vert du gouvernement central», a annoncé M. de Guindos.

Une décision historique pour ce pays très décentralisé, et qui a déjà suscité une première réaction: «inacceptable» et «intolérable», a tranché Francesc Homs, porte-parole du gouvernement de Catalogne, sur les ondes de Catalunya Radio.