Que le jeune Kim Jong-Un soit prêt ou non pour diriger la Corée du Nord, il hérite d'un pays à l'économie en ruine, dont la population est mal nourrie et le système politique hermétique à toute réforme.

Âgé de moins de 30 ans, celui que la presse officielle nord-coréenne décrit déjà comme «le grand successeur» de son feu père, l'ex numéro un Kim Jong-Il, n'avait aucune expérience des affaires de l'Etat ni de l'armée avant d'être choisi comme héritier officiel il y a trois ans.

«Ce pays ne peut pas être dirigé par un novice», avertit le quotidien sud-coréen Korea Herald dans son éditorial mercredi.

Parmi les «misères» de la Corée du Nord, le journal cite pêle-mêle le manque d'approvisionnement en nourriture et énergie, les faibles investissements étrangers, la corruption, la répression, les privilèges des militaires et «une fierté mal placée» de son statut de puissance nucléaire.

Le Nord communiste connaissait pourtant un taux de croissance supérieur à celui de son voisin capitaliste du Sud dans les années 60. Mais la perte de l'aide cruciale apportée par l'Union soviétique a accéléré un déclin dans les 90, marquées par des famines ayant tué des centaines de milliers de personnes, sinon plus.

D'après la plupart des estimations, le produit intérieur brut par habitant s'élève à 1/19e de celui du voisin du Sud.

«Cet écart de développement massif reflète l'échec terrible de l'économie planifiée de la Corée du Nord depuis 1945», juge Rajiv Biswas, économiste au cabinet d'analyse IHS.

L'économie du Nord a connu la récession en 2010 pour la deuxième année consécutive, sur fond de production agricole poussive, de difficultés de l'industrie à s'approvisionner en énergie et matières premières et de sanctions internationales plus sévères.

Le pays dispose pourtant de vastes ressources en charbon et autres minerais, d'une valeur totale estimée par la Corée du Sud à 6300 milliards de dollars. Mais la Corée du Nord en quête éperdue de devises étrangères en cède l'essentiel des droits d'exploitation à des entreprises chinoises.

Au-delà des murs immaculés de la capitale Pyongyang, des millions de pauvres hères peinent quotidiennement à trouver une alimentation suffisante pour leur famille.

La dirigeante des programmes humanitaires de l'ONU, Valerie Amos, qui s'est rendue en Corée du Nord en octobre, a appelé le monde à lutter contre la «terrible» malnutrition frappant la population du pays, estimant à six millions le nombre de personnes ayant besoin d'aide en urgence.

Les agences de l'ONU assurent avoir instauré un système leur permettant de contrôler que l'aide envoyée parvient effectivement aux nécessiteux, sans finir dans les stocks de l'armée. Mais les dons aux Nations Unies pour la Corée du Nord ont baissé à mesure que montaient les ambitions nucléaires de Pyongyang.

La Chine, principal allié et soutien économique de la Corée du Nord, a pressé son voisin d'adopter les réformes libérales qu'elle a elle-même progressivement mis en place depuis trois décennies.

Des marchés privés locaux sont certes apparus au Nord après l'effondrement du système de distribution alimentaire à l'époque des famines. Kim Jong-Il a même encouragé une ouverture limitée en 2002 mais est revenu sur cette réforme trois ans plus tard par crainte d'en perdre le contrôle.

Malgré l'opposition officielle, des marchés libres continuent d'exister mais selon des analystes, une vaste libéralisation économique pourrait être fatale au régime communiste censé subvenir aux besoins de la population.

«Pour l'instant, l'hypothèse la plus probable est le maintien d'un statu quo précaire», résume Sukhy Ubhi, de l'institut de recherche Capital Economics.

Cette possibilité prolongerait pour un moment encore la triste exception nord-coréenne, nation pauvre noyée dans l'océan de prospérité de l'Asie orientale.