La Chine a importé pour 74 milliards de dollars de produits agroalimentaires de partout dans le monde, en 2010. Le porc canadien, dont les exportations ont quadruplé en un an, est parmi les denrées en demande. Les Chinois se font aussi offrir du sirop d'érable, du cidre de glace et des gâteaux surgelés du Québec. Succomberont-ils?

Vendre en Chine du gâteau au fromage fait au Québec, quatre fois plus cher que chez nous. C'est ce que réussit à faire George Michael, président de Sublime Dessert, depuis deux ans.

«Nos gâteaux sont faits à Saint-Laurent, dit l'entrepreneur, rencontré à la foire FHC de Shanghai. Ils sont ensuite transportés en conteneur surgelé par train jusqu'à Vancouver, puis par bateau jusqu'en Chine.»

Le résultat est délicieux, pas trop sucré, M. Michael ayant adapté la recette aux goûts de l'empire du Milieu. «Les Chinois adorent ça, se réjouit-il. Il y a une clientèle pour nos gâteaux haut de gamme ici: comptez les Mercedes et les Audi dans les rues, il y en a plus qu'à Montréal.» Sublime Dessert réalise 6% de ses ventes en Chine. «Ce n'est pas si important, mais ça va venir», assure son président.

L'importance de l'image en Chine

La Chine «a un énorme appétit pour les produits haut de gamme importés», confirme Charles Crawford, fondateur du Domaine Pinnacle, qui y exporte son cidre de glace depuis cinq ans. «Comment on y est perçu socialement est très important, explique-t-il. Avoir des produits de qualité l'est aussi.» Peu importe le prix.

Selon une enquête de Datamonitor réalisée en 2009, 89% des consommateurs chinois considèrent que les biens matériels sont «importants ou très importants». En moyenne dans le monde, seuls 48% des gens partagent cette opinion.

Une petite bouteille de sirop d'érable biologique de 250 ml coûte 140 yuans au supermarché CitySuper de Pudong, le Manhattan de Shanghai. Soit 22,65$! «On vend un mode de vie», a fait valoir Yano Takaki, responsable des achats de la chaîne CitySuper, aux entrepreneurs canadiens qui l'ont rencontré en novembre.

Michael Zhu, président du nouveau supermarché Ja-e de Shanghai, veut abaisser les prix des produits importés. Mais il ne faut pas vendre trop bon marché, «sinon les gens pensent que c'est du faux», souligne-t-il.

Homme d'affaires ambitieux, M. Zhu compte ouvrir 200 succursales Ja-e d'ici 2015. «En 2030, nous aurons 4500 magasins», prédit-il. Or, l'unique Ja-e était désert, lors du passage de La Presse et d'entrepreneurs canadiens, en novembre.

Trop beau pour être vrai?

«Il y a beaucoup de hopeful thinking en Chine, estime Luc Tardif, des produits de l'érable Great Northern. Les gens nous disent: tout est beau, on démarre notre compagnie, on va vendre comme tu ne peux pas t'imaginer. Je ne vis pas d'espoir, je vais y croire quand je vais avoir l'argent.»

George Michael, de Sublime Dessert, est plus positif. Un contact rencontré en Chine lui a récemment commandé... 10 000 gâteaux au fromage pour la Corée du Sud. «J'ai beaucoup de respect pour la Chine, dit-il. L'Europe est aux portes de la faillite, les États-Unis y sont presque, le Canada a des problèmes. Le seul pays au monde qui a de l'argent dans ses poches, c'est la Chine. Il faut qu'ils aient confiance en toi, après ça va tout seul.»