Après la fin de l'URSS, la Russie a connu espoirs et désillusions dans sa conversion au marché: planification et pénuries ont laissé place aux oligarques et à des millions de pauvres, et la prospérité de la nouvelle classe moyenne dépend toujours largement de la rente pétrolière.

Ironie du sort, les vingt ans de la fin du régime soviétique surviennent à un moment où les économies occidentales traversent une passe difficile et verraient volontiers la Russie, premier producteur mondial de gaz et de pétrole, leur tendre la main. Mais cet atout constitue aussi une faiblesse majeure, qui rend le pays vulnérable à la chute des cours du brut.

La chute des cours dans les années 1980 avait joué un rôle déterminant dans l'effondrement de l'URSS, en mettant à genoux son économie déjà plombée par la course aux armements, la faible compétitivité de ses industries et la pénurie des biens de consommation les plus élémentaires.

La chute du régime communiste en 1991 ouvre alors une période de conversion enthousiaste à l'économie de marché.

Le nouveau président russe, Boris Eltsine, s'entoure d'une équipe de jeunes libéraux nourris aux préceptes occidentaux, persuadés de pouvoir faire passer le pays à l'économie de marché grâce à une «thérapie de choc».

Mais la libéralisation des prix conduit à une inflation galopante et à l'évaporation de l'épargne des Russes, ce qui vaudra à son promoteur Egor Gaïdar, un jeune économiste nommé à la tête du gouvernement, une franche et durable inimitié de la part de la population.

Ce dernier se défendra en soulignant avoir réussi à éviter au pays la famine et la guerre civile, alors que les caisses du pays étaient vides.

Les privatisations de masse ne laisseront pas un meilleur souvenir.

On distribue à chaque citoyen, du paysan à l'ouvrier et à l'employé, un «bon de privatisation» correspondant à une part de l'économie nationale. Mais l'opération est un échec, la plupart des Russes ne sachant que faire de leur «voucher». Des entrepreneurs prévoyants les rachètent par milliers pour une bouchée de pain.

Sous la pression d'un Parlement conservateur et d'une opinion publique en pleine désillusion, Gaïdar est remplacé par un ancien apparatchik soviétique, Viktor Tchernomyrdine, puis écarté définitivement du pouvoir en 1994.

Arrive le temps des «arrangements» du pouvoir avec des hommes d'affaires de plus en plus puissants, les «oligarques».

Ceux-ci mettent la main, lors d'enchères organisées dans des conditions opaques, sur des fleurons de l'économie, notamment dans les secteurs minier et pétrolier, en échange de leur soutien et de celui de leurs médias au président Eltsine.

Alors que la population peine à joindre les deux bouts, ces «oligarques» étalent au grand jour leurs fortunes.

Le désenchantement culmine en 1998 quand le pays se déclare en faillite.

Mais l'année suivante, la remontée des cours du brut offre une nouvelle donne, qui sera une chance pour Vladimir Poutine arrivé au pouvoir en 2000.

Le niveau de vie se redresse, les constructions s'enchaînent à un rythme effréné, les enseignes de magasin se multiplient, une part croissante de la population goûte aux joies de la consommation et des voyages.

Vladimir Poutine, voit sa popularité grimper en flèche, d'autant qu'il a mis au pas les oligarques, mettant en prison celui d'entre-eux qui affichait des ambitions politiques, Mikhaïl Khodorkovski.

Pour autant, alors que les taux de croissance bondissent, les autorités repoussent sans cesse les réformes structurelles. Dans le même temps, la corruption atteint des sommets, et 20 millions de Russes, selon les derniers chiffres, vivent en-deçà du seuil de pauvreté.

En 2009, la Russie est frappée de plein fouet par la crise économique mondiale.

Le pays a depuis renoué avec la croissance, mais les promesses de modernisation du nouveau président Dmitri Medvedev peinent à convaincre. D'autant que Vladimir Poutine a annoncé son intention de revenir au Kremlin en 2012, suscitant même la crainte d'une nouvelle «stagnation».