Le président français et la chancelière allemande sont prêts à se mobiliser mercredi pour tenter d'arracher un accord sur la Grèce avec les banques, lors d'un sommet de crise sur la zone euro qui s'annonce pauvre en résultats tangibles.

Nicolas Sarkozy et Angela Merkel envisagent d'aller eux-mêmes négocier dans la nuit à Bruxelles avec les banques créancières de la Grèce pour qu'elles acceptent une perte d'un peu plus de 50%, a indiqué mercredi une source gouvernementale européenne, alors que les négociations menées à ce sujet peinent à être bouclées.

Il est «possible qu'ils aillent les rencontrer», a-t-elle dit.

La France et l'Allemagne sont à présent d'accord pour demander au total des pertes «d'un peu plus de 50%» aux banques privées sur la valeur des créances qu'elles détiennent sur la Grèce, selon cette source. Et ce avec l'objectif de ramener la proportion de dette publique grecque par rapport à son produit intérieur brut de 160% aujourd'hui à 120% en 2020.

Un accord de principe semble à portée de main avec les banques pour une perte (ou «décote») d'un peu plus de 50%, selon la source. Toutefois, les tractations avec les banques coincent sur des garanties qu'elles réclament en échange de ces pertes de la part du Fonds européen de stabilité financière (FESF), le fonds de secours de la zone euro, selon la source.

Et tant que les deux volets ne sont pas réglés, il n'y a pas d'accord.

Le sauvetage de la Grèce via un effacement partiel de sa dette est l'un des trois volets essentiels du plan que la zone euro veut mettre sur pied pour stopper la contagion de la crise de la dette qui la menace.

En échange, un accord visant à recapitaliser les banques européennes pour leur permettre d'amortir le choc a été confirmé mercredi lors du sommet.

«Nous nous sommes mis d'accord sur la recapitalisation des banques qui doit être l'un de nos principaux objectifs», a déclaré le Premier ministre polonais Donald Tusk, dont le pays préside l'UE.

L'accord prévoit que les fonds propres «durs» des banques soit relevé, à 9%, un objectif qui «devra être atteint au 30 juin 2012», selon le texte du sommet. Pour y parvenir, «les banques devront faire appel en priorité à des sources de capital privées», avant de se tourner vers les pouvoirs publics, nationaux ou européens.

Le troisième volet, le plus important, prévoit de renforcer la capacité d'intervention du FESF, afin d'éviter que l'incendie ne gagne l'Italie et l'Espagne, après la Grèce, l'Irlande et le Portugal.

Sur ce point, le projet d'accord du sommet de la zone euro prévoit de «démultiplier» sa capacité d'intervention, a indiqué à l'AFP une source gouvernementale, mais il ne donne aucun montant. Ce qui risque de décevoir les marchés financiers qui attendaient des détails à ce sujet, ainsi que le reste de la planète qui escomptaient la réponse «complète et crédible» promise par la zone euro.

Problème, la formule choisie par les Européens ne permet pas à ce stade de chiffrer précisément les montants.

Deux options sont envisagées pour renforcer le mécanisme: un système d'assurance-crédit consistant à garantir une partie des pertes éventuelles des investisseurs lorsqu'ils prêtent de l'argent à des pays fragiles de la zone euro, et d'autre part la mise en place d'un ou plusieurs fonds spéciaux, destinés à attirer les investisseurs extérieurs, comme les pays émergents. L'un d'eux serait adossé au FMI.

Paris et Berlin sont d'accord pour multiplier par «au minimum» quatre la force de frappe du FESF avec la première option, selon une source diplomatique, ce qui devrait la porter à au moins 1000 milliards d'euros.

Cet objectif est partagé par la plupart des pays. «La capacité d'intervention (du fonds) doit être d'un cran au-dessus des 1000 milliards d'euros», a estimé le chef du gouvernement belge Yves Leterme.

Les détails seront donc renvoyés à des réunions ultérieures de ministres européens des Finances. Ils ne devraient pas être réglés à temps pour le sommet des pays industrialisés et émergents du G20 qui est prévu les 3 et 4 novembre à Cannes en France.

La deuxième option doit permettre de faire aussi appel à l'aide des pays émergents, Chine en tête, au sein du dispositif spécial adossé au Fonds monétaire international.

Des négociations sont en cours avec les grands pays émergents des Brics (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud).

Pékin a d'ores et déjà accepté de contribuer via l'option d'un fonds adossé au FMI. «La Chine est pour», a indiqué à l'AFP une source diplomatique.

La France y est «favorable», selon une source gouvernementale, et le président français «va téléphoner» jeudi au président Hu Jintao à ce sujet.

Après avoir longtemps assuré qu'ils se sortiraient seuls de l'ornière, les Européens se sont rendus à l'évidence: ils s'avouent implicitement incapables de créer à eux seuls un pare-feu assez large pour contenir l'incendie de la crise de la dette.

La Russie s'est dite aussi prête à participer via le FMI.