Malgré l'esquisse d'un front uni après des semaines de divergences, les grandes puissances du G20 ont une nouvelle fois échoué à Washington à rassurer pleinement, en donnant l'impression d'avoir épuisé les solutions concrètes face à la crise.

Les analystes étaient unanimes vendredi: les ministres des Finances et banquiers centraux du G20 ont déçu.

Et si les marchés ont finalement rebondi après avoir longtemps poursuivi leur plongeon de la veille, c'est surtout grâce à l'espoir -non confirmé- de nouvelles mesures de la Banque centrale européenne en faveur des établissements financiers.

L'heure est pourtant grave, a prévenu vendredi la directrice générale du Fonds monétaire international Christine Lagarde: «s'il n'y a pas d'action collective rapide, nous courrons le risque de perdre la bataille de la croissance» et d'assister à «un effondrement de la demande mondiale».

Les vingt principaux pays riches et émergents, qui représentent 85% de la richesse mondiale, ont donc promis jeudi soir «une réponse internationale forte et coordonnée».

Leur communiqué évoque plusieurs volets qui vont au-delà des engagements des pays riches du G7, qui, le 9 septembre en France, avaient eu l'effet d'un coup d'épée dans l'eau.

Alors que des banques européennes, notamment françaises, sont soupçonnées par les investisseurs de n'avoir pas assez de fonds propres pour faire face à une éventuelle faillite de la Grèce et à la contagion qu'elle entraînerait dans la zone euro, les ministres ont promis de faire en sorte qu'elles «disposent d'un capital adéquat».

Et, en plein débat entre Etats-Unis et Européens sur la politique à suivre - relance selon les premiers, réduction du déficit pour les seconds - les gouvernements ont tenté une synthèse, s'engageant à «soutenir la croissance, mettre en oeuvre des plans de consolidation budgétaire crédibles et assurer une croissance forte, durable et équilibrée».

La nuance, assure le membre d'une délégation, réside dans l'ordre de l'énoncé: la croissance, citée deux fois, arrive en tête, au moment où les craintes d'une rechute de l'Occident dans la récession gagnent en vigueur. Les banques centrales continueront aussi «à soutenir la reprise».

Mais le ministre allemand Wolfgang Schäuble a semblé balayer vendredi cette interprétation: «Il est plus important de lutter contre les causes réelles de la crise, et ces causes sont les déficits élevés», a-t-il réaffirmé.

La réunion du G20 ne devait initialement donner lieu à aucune déclaration. Mais les puissances étaient face à un dilemme: rester muettes en pleine débandade boursière aurait été interprété comme un aveu d'impuissance, alors qu'un communiqué trop faible risquait aussi d'aggraver la solution.

La présidence française du G20 a choisi la voie d'une déclaration, en tentant de muscler le discours du G7. Et, après des passes d'armes entre Américains et Européens, Washington a calmé le jeu en notant l'engagement de la zone euro à prendre les mesures nécessaires à sa stabilité financière.

Car la zone euro, «épicentre de la crise» selon l'expression du Brésilien Guido Mantega, était pressée de toutes parts (par Washington, Londres, Ottawa et les grandes puissances émergentes) de mettre de l'ordre chez elle.

En guise de réponse, les Européens ont réaffirmé leur stratégie en donnant rendez-vous à la prochaine réunion du G20-Finances, les 14 et 15 octobre à Paris, lorsque l'accord du 21 juillet par lequel la zone euro s'engage à aider à nouveau la Grèce et à renforcer son fonds de secours devrait être, en principe, enfin opérationnel.

Les Américains ont eux plaidé la cause de leurs plans pour l'emploi et la réduction du déficit, et le Japon a défendu sa politique de reconstruction après le tsunami de mars.

«Voilà tout!», ont lancé les analystes de High Frequency Economics, en résumant la frustration des investisseurs. Ces trois puissances «se sont engagées à faire ce qu'elles s'étaient déjà engagées à faire, et aucun des Vingt n'a apporté à cette réunion la moindre nouvelle initiative politique. Génial!», ont-ils ironisé.

D'autant que la mise en musique de la réponse «forte et coordonnée» à la crise a été repoussée au sommet du G20 de Cannes, les 3 et 4 novembre dans le sud de la France, lorsque les pays présenteront un «plan d'action collectif ambitieux, dans lequel chacun aura son rôle à jouer».