La campagne pour le poste de directeur général du Fonds monétaire international aurait pu être une chance pour les pays du groupe BRICS de montrer leur force collective, mais elle a au contraire révélé les limites de leur alliance, selon des analystes.

Les cinq grands pays émergents que sont le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine et l'Afrique du Sud, qui représentent à eux seuls 40% de la population mondiale, sont apparus coomme un contrepoids possible aux nations occidentales.

La campagne pour la succession de Dominique Strauss-Kahn à la direction générale du FMI semblait constituer une occasion idéale pour mettre l'accent sur l'une de leurs principales revendications: que les institutions dominées par les pays occidentaux s'ouvrent aux pays émergents.

Fin mai, d'une seule voix, ils se sont officiellement élevés contre la mainmise de l'Europe sur le poste de directeur général du FMI.

Dans un communiqué commun, ils ont demandé l'abandon de «la convention non écrite et obsolète qui prévoit que le dirigeant du FMI soit forcément européen».

Cette convention tient depuis 1946, grâce à l'appui des États-Unis qui monopolisent la présidence de la Banque mondiale.

Mais au soir du 10 juin, date limie du dépôt des candidatures, seul le Mexicain Agustin Carstens, gouverneur de la Banque du Mexique, se posait en rival de Christine Lagarde, la favorite naturelle.

Malgré une tournée mondiale, M. Carstens n'a recueilli le soutien public d'aucun pays émergent.

Le FMI compte choisir son nouveau directeur général le 30 juin au plus tard.

«Le groupe des BRICS ne représente pas une force diplomatique car à part le fait qu'il ne réunit que des pays émergents, ces pays ont peu de choses en commun», estime Jayshree Sengupta, analyste à l'institut Observer Research Foundation de New Delhi.

Né en 2001 de la plume d'un économiste de la banque d'investissement Goldman Sachs, le terme BRICS (sans «s» à l'origine, ajouté ensuite avec l'entrée de l'Afrique du Sud), désgine cinq pays qui ont pour principale caractéristique commune de connaître une forte croissance.

«Les pays du BRICS n'ont pas beaucoup de politiques en commun», ajoute M. Sengupta. «Ils pourraient donner l'apparence d'un groupe qui à l'avenir sera puissant , mais le ciment de ce groupe fait défaut».

Pour Andrew Kenningham, économiste chez Capital Economics à Londres, «il (le groupe des BRICS) n'est pas très uni et son influence est limitée».

«Tous ces groupes multilatéraux ont des difficultés, car in fine, chaque gouvernement suit son propre agenda», a-t-il ajouté.

Sur la question même de la direction du FMI, derrière leur unité de façade, chacun des cinq «BRICS» est dans une position très différente.

«Si les BRICS avaient voulu empêcher la nomination d'un Européen, ils auraient pu», a estimé Edwin Truman, de l'Institut Peterson d'économie internationale à Washington.

«S'ils avaient tous apporté leur soutien à Carstens, de nombreux autres pays en développement les auraient suivis, et selon moi, les Etats-Unis, et peut-être le Canada et le Japon en auraient fait autant», a-t-il ajouté.

Mais pour Mark Weisbrot, co-directeur du Centre de recherches économiques et politiques de Washington, les superpuissances de demain, qui ont montré un visage uni notamment pour dénoncer les frappes de l'Otan en Libye, ont simplement choisi de ne pas déclencher une bataille, pour en mener peut-être d'autres.

«On ne peut pas leur reprocher de ne pas se battre concernant la direction générale du FMI. S'il fallait choisir une bataille, je ne choisirais pas celle-ci». Leur position est «une position assez symbolique», a-t-il estimé.