À l'instar du président français Nicolas Sarkozy qui appelait à une réforme du capitalisme, le professeur Yvan Allaire souhaite une modification radicale du fonctionnement du système économique. Il a partagé ses principales recommandations avec l'auditoire du forum économique de Davos.

Le président de l'Institut de la gouvernance des organisations privées et publiques (IGOPP) de Montréal suggère notamment d'abolir les options accordées aux cadres supérieurs comme forme de rémunération. Il propose par ailleurs l'imposition d'une taxe minime sur toutes les transactions boursières modulées en fonction de la durée de détention des actions.

«Ça n'a pas de sens, ce qui s'est passé, a dit au téléphone M. Allaire en faisant allusion à la crise financière de 2008. Il faut arriver à des propositions assez radicales pour ne pas se taper des crises à tout bout de champ.»

Yvan Allaire a fait part de ses réflexions dans le cadre d'un comité de travail sur l'entreprise du XXIe siècle, appelé Global Council, auquel participe M. Allaire en compagnie de 15 personnalités du monde de la grande entreprise et du milieu universitaire. Après avoir entendu les diverses propositions, dont celles de M. Allaire, les membres de ce Global Council s'entendront dans les prochains jours sur un document final qui fera consensus parmi eux.

Sa dizaine de propositions ne surprendra pas les lecteurs de son récent livre Black Markets... and Business Blues, qu'il a écrit avec la professeure Mihaela Firsirotu, portant sur les causes de la crise financière. La plupart s'y trouvaient déjà, étayées sur plusieurs pages.

Certaines des recommandations visent à accentuer la loyauté de l'actionnaire. Par exemple, le droit de vote devrait pouvoir être exercé après une détention minimale d'un an. D'autres portent sur la question toujours délicate de la rémunération des dirigeants. À défaut d'abolir les options d'actions carrément, les gouvernements devraient mettre la hache dans les avantages fiscaux qui y sont rattachés, propose-t-il comme solution mitoyenne. Autre piste à explorer, le conseil d'administration devrait plafonner la rémunération des dirigeants en fonction d'un multiple appliqué à la rémunération médiane des employés.

D'autres propositions concernent la diversité des structures de propriété des entreprises. Au passage, M. Allaire réhabilite les actions avec droit de vote multiples, qui n'ont pourtant pas bonne presse. Selon le penseur, elles ont le mérite de stabiliser l'actionnariat de contrôle d'une société. Google et Berkshire Hataway y ont recours, souligne-t-il.

Yvan Allaire demande aussi au CA des entreprises d'avoir autant à coeur le bien-être de l'entreprise et pas seulement l'intérêt de l'actionnaire.

L'avenir dira quel sort les leaders économiques de la planète réserveront aux idées de M. Allaire. Le capitalisme ne se laisse pas réformer facilement, demandez-le au président français.