Le secteur manufacturier ne dérougit pas en Chine, selon de nouvelles données économiques. Si les pays qui composent le BRIC - Brésil, Russie, Inde et Chine - sont les locomotives de la reprise mondiale, ils affrontent aussi des défis qui pourraient menacer à terme leur croissance.

Au premier coup d'oeil, les chiffres donnent le vertige. Les quatre pays du BRIC (Brésil, Russie, Inde, Chine) sont en train de prendre une position dominante dans l'économie mondiale.

C'est en 2001 que l'expression BRIC est apparue pour la première fois. C'est une invention de la maison new-yorkaise Goldman Sachs, qui voulait attirer l'attention sur les quatre grandes économies émergentes, qui lui semblaient pleines de promesses à l'époque. L'expression a rapidement fait partie du vocabulaire courant des milieux économiques et financiers.

Déjà, en 2001, Goldman Sachs s'attendait à ce que la Chine, à elle seule, devienne la première économie mondiale, devant les États-Unis, en 2041. Or, à mesure que les années passaient, on s'apercevait que la prévision était bien en deçà de la réalité. Aujourd'hui, certains prévisionnistes pensent que la Chine pourrait dépasser les États-Unis quelque part avant 2025, peut-être même entre 2015 et 2020.

Le fait est que la croissance économique des pays du BRIC, surtout ces dernières années, tient du prodige. Depuis quatre ans, le produit intérieur brut combiné des quatre pays est passé de 5,6 à 8,6 mille milliards de dollars (américains), un bond impressionnant de 53%. Pendant la même période, aux États-Unis, la progression du PIB n'atteignait que 10%.

Pourtant, on aurait tort de considérer le BRIC comme un énorme rouleau compresseur qui bouleversera l'économie mondiale, pour un certain nombre de raisons.

D'abord, une réalité: le BRIC, c'est d'abord la Chine. À elle seule, la taille de l'économie chinoise est plus importante que celles des trois autres pays réunis. Le volume des exportations chinoises dépasse également ceux du Brésil, de l'Inde et de la Russie réunis. Autrement dit, sans la Chine, le BRI ne serait qu'un trio de pays émergents; pas parmi les plus petits, certes, mais avec un poids nettement moins important.

D'autre part, le BRIC demeure une créature floue. Ce n'est pas (du moins, pas encore) une organisation internationale structurée, on peut à peine parler d'association. Ce n'est que l'an dernier, en 2009, que les dirigeants politiques du BRIC ont convenu d'organiser leur premier sommet.

Sur les plans culturel, politique, économique et social, on peut difficilement imaginer partenaires plus mal assortis. En fait, on retrouve de tout dans ces quatre pays: l'Inde et le Brésil tiennent des élections libres, la Chine et la Russie ne font pas grand cas des droits humains; l'économie russe, et en grande partie celle du Brésil, reposent sur l'exploitation des ressources, alors que l'Inde et la Chine comptent sur l'exportation de produits finis.

Au bout du compte, les quatre pays n'ont vraiment que deux choses en commun. La première, c'est que tous les quatre sont des économies émergentes. La seconde, c'est qu'ils sont tous minés par le fléau de la corruption. Selon le dernier classement de Transparency International, qui fait autorité en la matière, le Brésil ne peut faire mieux qu'une 69e place (sur 178 pays étudiés) au palmarès de la corruption. Et le Brésil est le moins corrompu du groupe. La Chine arrive au 78e rang, l'Inde au 87e, et la Russie figure parmi les pires dépotoirs de corruption de la planète avec la 154e place. Ce ne sont pas précisément les endroits les plus reposants pour faire des affaires.

Malgré la rapide croissance économique, les inégalités subsistent, surtout en Chine, où on compte maintenant, le long de la côte, quelques provinces riches alors que l'intérieur du pays continue de vivre dans la misère. Même lorsque la Chine, probablement aux environs de 2020 si on en croit certaines projections, deviendra la première économie de la planète, son produit intérieur brut par habitant, exprimé en parité de pouvoir d'achat, restera quatre fois inférieur à celui des États-Unis.

Enfin et surtout, la croissance rapide des économies du BRIC, en Chine en particulier, a entraîné une importante augmentation des émissions de gaz à effet de serre. Les parcs automobiles de la Chine et de l'Inde augmentent à toute vitesse, et ce n'est pas fini: on compte actuellement 15 voitures pour 1000 habitants en Inde, 27 voitures en Chine, 200 au Brésil... contre 800 aux États-Unis. On voit le potentiel, d'autant plus que le constructeur indien Tata offre maintenant des voitures à des prix sensationnels.

Tour cela va entraîner une hausse sans précédent de la demande de pétrole. Et ce n'est pas tout: les installations industrielles des pays émergents auront de plus en plus besoin de pétrole, mais aussi de charbon, de gaz naturel, d'uranium. Il y a une limite à ce que la Terre peut fournir, et peut-être verra-t-on, bien avant 2025, la pénurie de matières premières déjouer les plus savantes prévisions.