Le taux de change de l'euro est trop élevé actuellement ce qui «pourrait affecter» la fragile reprise économique en cours, s'est inquiété jeudi la Commission européenne en visant non seulement la Chine, mais aussi les États-Unis, alors que le dollar a beaucoup baissé.

«Nous estimons actuellement que l'euro supporte une part disproportionnée de l'ajustement des taux de change dans le monde et que (...) cela pourrait affecter la reprise économique, les exportations», a déclaré devant la presse le porte-parole de la Commission pour les questions économiques et monétaires, Amadeu Altafaj.

Une hausse de l'euro par rapport aux autres grandes monnaies mondiales renchérit en effet comparativement les prix des produits exportés par les pays qui utilisent la monnaie unique.

Le taux de change de l'euro a beaucoup augmenté ces dernières semaines. Jeudi, il frôlait le seuil de 1,40$ US sur les marchés alors que la crainte d'une «guerre des changes» entre grandes zones économiques s'accroît dans le monde.

Le porte-parole a répété que les Européens étaient notamment préoccupés par le niveau du yuan chinois, qui est «toujours sous-évalué de manière significative».

Mais, a-t-il ajouté, le message sera aussi adressé aux États-Unis dont la monnaie, le dollar, s'est dans le même temps beaucoup déprécié par rapport à l'euro.

«Pour nous il s'agit d'une question cruciale dans un contexte de reprise (économique) fragile et d'incertitudes. Nous allons continuer à le dire aux Chinois mais aussi aux Américains et à M. (Timothy) Geithner», le secrétaire au Trésor américain, a-t-il ajouté.

Certains économistes estiment que Washington se satisfait pleinement de voir le billet vert fondre car cela stimule les exportations au moment où la croissance du pays patine.

Les propos de la Commission européenne surviennent alors que les questions monétaires domineront une réunion des grands argentiers et gouverneurs des banques centrales des pays du G7 vendredi soir à Washington, puis l'assemblée annuelle du FMI au même endroit dans la foulée.

Concernant le yuan, le porte-parole de l'exécutif européen a confirmé que les échanges entre responsables européens et le Premier ministre chinois Wen Jiabao avaient été vifs la veille lors d'un sommet UE-Chine à Bruxelles.

«Nous avons dit très franchement à M. Wen, sans pressions et je tiens à le souligner, que nous pensions que la Chine doit honorer ses engagements» à gérer le taux de change de leur monnaie de manière plus flexible, a-t-il souligné.

Or, «lorsque vous observez les taux de change il est clair que ces annonces n'ont pas été suivies d'avancées concrètes, au moins en ce qui concerne le taux de change de l'euro», a regretté Amadeu Altafaj.

La veille, M. Wen avaient appelé l'Europe à cesser de faire «pression» sur son pays pour obtenir une appréciation plus rapide du yuan chinois.

L'Europe soupçonne Pékin de faire de la dévaluation compétitive en maintenant sa monnaie à un niveau artificiellement bas afin de doper ses exportations et sa croissance.

Lors d'une conférence de presse séparée, le commissaire européen au Commerce Karel de Gucht a estimé que le déficit commercial très important des pays de l'UE à l'égard de la Chine s'expliquait non seulement par le yuan faible, mais surtout par les «subventions financières» apportées par Pékin à ses entreprises.

L'Union européenne vient d'ouvrir à l'encontre de Pékin une enquête sur de telles subventions, visant le secteur des modems chinois.