Le spectre de la crise de la dette menace à nouveau la zone euro, où l'Irlande en pleine tourmente vient d'annoncer un déficit exorbitant de 32% pour cette année et alors que l'Espagne a vu sa note dégradée par une agence de notation.

Le gouvernement irlandais a annoncé jeudi que le déficit public du pays atteindrait 32% du PIB cette année, du jamais-vu en zone euro, à cause du sauvetage de l'Anglo Irish Bank dont le coût a été révisé en forte hausse, tout en maintenant son engagement de revenir sous 3% du PIB en 2014.

Cela va faire également s'envoler la dette publique irlandaise à 98,6% du PIB cette année en données brutes, contre 64% fin 2009.

Ce déficit impressionnant inquiète, car l'Irlande est, après la Grèce au printemps, considérée comme le principal maillon faible de la zone euro, même si les autorités européennes se sont voulues rassurantes.

Mais les marchés accueillaient avec calme ces mauvaises nouvelles, finalement moins pires que prévu, selon les analystes. Vers 8h, ils étaient quasiment à l'équilibre: Francfort était stable, Londres affichait +0,17%, Madrid +0,09%, Lisbonne +0,17% Paris -0,11% et l'Eurostoxx 50 -0,18%.

Le président de la Banque centrale européenne Jean-Claude Trichet a salué les annonces «très importantes du gouvernement irlandais», soulignant qu'elles étaient vitales pour assurer la crédibilité de Dublin en matière budgétaire, à l'issue d'une réunion des ministres des Finances de la zone euro à Bruxelles.

«Nous pensons que le gouvernement irlandais pourra résoudre son problème sans avoir recours au Fonds de sauvetage» européen, a déclaré de son côté le chef de file des grands argentiers de la zone euro, Jean-Claude Juncker.

La question se pose malgré tout. Ce Fonds de stabilisation européen avait été mis en place au printemps pour parer à tout risque de contagion de la crise grecque au reste de la zone euro.

Créé pour trois ans, cet instrument doit permettre d'emprunter sur les marchés avec des garanties des États de la zone euro, qui pourront s'élever jusqu'à 440 milliards d'euros.

Le directeur du Fonds, Klaus Regling, a cependant écarté toute intervention.

Le dispositif «est pleinement opérationnel et nous sommes prêts», a-t-il dit jeudi, mais il ne devrait pas être utilisé «en particulier parce que les pays concernés ont annoncé des mesures supplémentaires de consolidation» budgétaire, a-t-il dit.

Outre l'Irlande, l'Espagne inquiète aussi. L'agence de notation Moody's lui a retiré jeudi sa note maximale «Aaa», invoquant la «détérioration considérable de la solidité financière du gouvernement». Cela risque de renchérir le coût d'emprunt pour Madrid.

Mais l'agence se dit rassurée par le projet de budget espagnol pour 2011, marqué par l'austérité, qui sera présenté au Parlement dans la journée.

Le Portugal, également confronté à des difficultés budgétaires et soumis à une pression croissante des marchés, a présenté mercredi soir un train de mesures d'austérité pour 2011. Il prévoit pour la première fois une baisse des salaires de la fonction publique couplée à une nouvelle hausse d'impôt.

«Les marchés ont donné des signes d'inquiétude quant à la situation du Portugal. J'espère qu'avec ces mesures, nous retrouverons la confiance», a déclaré le ministre portugais des Finances, Fernando Teixeira Dos Santos, à Bruxelles.

Depuis deux semaines, les taux d'intérêt de la dette portugaise n'ont cessé de monter, atteignant des niveaux record.

M. Juncker s'est dit «satisfait» de ces annonces, tout en appelant le Portugal à réformer son économie.

«Nous exhortons les autorités portugaises à soutenir» ces mesures «par des réformes structurelles supplémentaires, complètes et ambitieuses», a-t-il ajouté.

«Nous y travaillons», a répondu Fernando Teixeira Dos Santos.