En mai dernier, nous demandions à des économistes de nous expliquer leur lecture de la situation en Grèce. Quatre mois plus tard, leur pronostic a-t-il changé? À leurs yeux, les difficultés actuelles ne sont que la suite logique des choses. Et pour renouer avec la croissance, la Grèce fait bien de courtiser les investisseurs étrangers. C'est sa seule planche de salut.

Maudire le gouvernement est devenu le passe-temps favori de tous les Grecs. Tous, sauf les économistes.

Jens Bastian voit bien les magasins à louer à Athènes et connaît des jeunes adultes qui travaillent bénévolement dans l'espoir de se faire embaucher.

Pourtant, le mot «intelligent» revient constamment lorsqu'il parle des démarches du cabinet de George Papandréou pour sortir le pays de l'ornière.

«Les 12 derniers mois ont été fascinants. Le pays est en train d'opérer un virage à 180 degrés», dit l'Allemand établi en Grèce depuis 13 ans. Jens Bastian, consultant économique pour le groupe de réflexion Eliamep, a conseillé le FMI dans ses négociations en avril et mai.

«La population souffre, c'est vrai. Mais c'est un passage obligé, elle a longtemps abusé des largesses du secteur public», corrobore Gikas Hardouvelis, professeur et économiste en chef au groupe EFG Eurobank Ergasias.

Baisse de la consommation, fermeture de commerces, hausse du chômage, ces premières séquelles ne les étonnent guère. Ils l'ont dit en mai: la convalescence sera longue.

«Je crois même que le chômage atteindra 15% dans un an, dit Gikas Hardouvelis. Les 12 prochains mois vont être durs. Il n'y a pas d'autre option. La Grèce ne peut plus se comporter comme une république soviétique, en empruntant excessivement tout en payant des gens à ne rien faire.»

L'attrait d'investisseurs est maintenant le nerf de la guerre. Le gouvernement souhaite privatiser en partie le secteur des Transports, de l'Énergie et des Postes. Il espère à tout prix trouver un partenaire pour acheter 49% des parts de la société ferroviaire OSE, endettée de 10 milliards d'euros.

«Il s'agit d'un programme prudent de privatisation qui incorporera la bonne gestion du secteur privé, explique M. Bastian. Ce n'est pas comme si l'État était à vendre.»

La Grèce est en campagne de charme pour attirer des capitaux étrangers, remarque l'économiste. Le premier ministre Papandréou a récemment accueilli des délégations du Qatar, de la Libye et de la Turquie. Cependant, aucune nation ne se montre plus enthousiaste que la Chine.

Déjà, en 2008, le groupe chinois Cosco faisait main basse sur deux quais de conteneurs au port d'Athènes. Une entente de 3,5 milliards d'euros. Aujourd'hui, la Chine est le troisième partenaire commercial du pays.

«La Grèce envoie de bons signaux au monde entier, dit M. Bastian. Elle montre qu'elle est prête à se moderniser.»

De son côté, Gikas Hardouvelis salue la volonté du gouvernement de libéraliser le marché du travail. «Le monopole des camionneurs est tel qu'il coûte plus cher de transporter des citrons sur 100 km en Grèce que de les importer d'Argentine. Ce n'est pas un climat attrayant pour les investisseurs étrangers.»

Il pense que la population est prête pour ces réformes. «Nous avons déjà vu des émeutes bien plus importantes pour le dixième des sacrifices que le gouvernement propose. Le bon sens triomphera», dit l'analyste.