Le parcours triomphal de l'Espagne au Mondial de football, en finale dimanche contre les Pays Bas, peut soutenir la croissance économique espagnole mal en point via un coup de pouce à la consommation, mais de manière ponctuelle, selon des économistes.

Une victoire «pourrait aider la consommation» des ménages, rendus euphoriques, mais ce serait «quelque chose de très conjoncturel, ponctuel», a déclaré à l'AFP Josep-Maria Sayeras, économiste à l'école Esade.

Mais même en cas de défaite, «certains secteurs d'activité pourraient bénéficier des performances espagnoles, comme l'hôtellerie (qui recouvre les bars), les commerces. On vend plus d'alcool», relève Juan Carlos Martinez Lazaro, économiste à l'IE Business School.

«Bien que nous n'ayons pas de chiffres concrets, nous attendons une augmentation de la consommation (...) de bière étant donné que les matches de football favorisent la fréquentation des bars», déclare à l'AFP le directeur général de l'association des brasseurs d'Espagne, Jacobo Olalla Marañon.

De même, l'entreprise Puente Robles, qui commercialise des produits de charcuterie «ibériques», comme le célèbre «jamon», a estimé que la demande avait augmenté de 64% ces dernières semaines grâce aux matchs de l'Espagne.

Frappée par l'éclatement de la bulle immobilière en 2008 et la crise financière, l'économie espagnole peine à sortir clairement de la récession.

L'envolée de ses déficits publics à 11,2% du PIB et celle du chômage à près de 20% de la population active, ont terni l'image de l'Espagne, devenue un des vilains petits canards de la zone euro.

M. Martinez Lazaro ne croit pas que le Mondial aura un «grand impact» sur l'économie, mais qu'en revanche, il pourrait redorer l'image du pays.

Dans une étude remontant à 2006, réalisée à l'occasion du Mondial en Allemagne, la banque ABN Amro estimait que «les effets macro-économiques (d'une coupe du monde) ne sont pas puissants au point de transformer une récession en un boom, mais ne devraient pas être sous-estimés».

La victoire en demi-finale sur l'Allemagne mercredi (1-0) «va faire du bien pour augmenter l'estime de soi et la confiance dans le pays», a fait valoir le chef du gouvernement, José Luis Rodriguez Zapatero.

ABN Amro a calculé qu'un «vainqueur de coupe du monde profite d'un bonus économique moyen de 0,7% de croissance additionnelle» sur un an.

«J'ai du mal à croire» que cela arrive en Espagne, déclare M. Martinez Lazaro. «Les problèmes structurels de l'Espagne sont trop profonds pour qu'une simple victoire nous sorte de là».

Le pays a enregistré une croissance anémique de 0,1% du PIB au premier trimestre et devrait subir une contraction de 0,3% cette année, selon le gouvernement.

Les économistes s'accordent pour dire que l'Espagne doit réformer son marché du travail, réduire ses déficits publics, gagner de la compétitivité et réformer son système financier.

Une victoire au mondial «peut être un rayon de soleil pour un certain temps, les gens osant plus consommer», selon M. Sayeras, mais «il y a beaucoup de nuages à l'horizon».

D'autant qu'ABN Amro a déjà relevé des exceptions à la règle du bonus de croissance. En 1974 et 1978, l'Argentine et l'Allemagne avaient enregistré de «forts replis» d'activité après la victoire.