Rien ne va plus entre les Britanniques et Barack Obama. Depuis le désastre signé «British Petroleum», ils se sentent désignés à la vindicte. Les Londoniens accusent même le président américain de faire mousser sa popularité sur le dos de BP. Avec pour conséquence le naufrage de leurs retraites à l'horizon.

La marée noire fait couler la «relation spéciale» entre les États-Unis et la Grande-Bretagne. C'est du moins l'opinion qui fait tache d'huile au royaume depuis quelques semaines.

Les Britanniques se sentent visés par l'attitude virulente de Barack Obama envers BP, qui était la première entreprise nationale avant la catastrophe meurtrière.

«Les Américains ne manquent pas une occasion de nous critiquer», dit Kerry Hughes, mécanicienne rencontrée dans un pub de la City, le quartier des affaires de Londres.

Car même s'ils se disent profondément troublés par le désastre environnemental, les sujets de la reine ne ressentent aucune honte face à BP.

Ils sont même exaspérés par la dénomination «British Petroleum», utilisée à outrance à la Maison-Blanche.

Affiliation américaine

En effet, l'entreprise n'est plus entièrement britannique depuis qu'elle a fusionné en 1998 avec une société américaine, Amoco, fondée par nul autre que John D. Rockefeller. Désormais, son appellation légale est simplement «BP».

D'autre part, BP comptait un partenaire américain dans l'aventure Deepwater, soit la pétrolière Anadarko.

La parenté américaine de BP n'a pas échappé aux Londoniens interrogés par La Presse.

«Tous les ouvriers de la plateforme étaient américains, dit Michael Schmid, un courtier de 43 ans. Ce sont aussi des Américains qui ont donné le feu vert aux opérations.»

La façon impérieuse dont la Maison-Blanche a sommé BP de suspendre le paiement de dividendes et de créer un fonds de 20 milliards US pour les dommages, fait aussi rechigner.

«Nous savons que Barack Obama est en baisse de popularité dans son pays, dit Jools Bage, qui travaille dans une salle de courrier pour une banque américaine. Il essaie de gagner des points avec ses électeurs.»

Pensions menacées

Le premier ministre David Cameron est sur la corde raide. Il a tenté de calmer le jeu à la mi-juin, lors d'une conversation téléphonique avec son homologue américain. Mais les Britanniques demeurent inquiets puisque leurs caisses de retraite comptent des actions de BP.

«Ce qui se passe est inquiétant pour quiconque a une pension, comme moi», dit un travailleur de la City qui n'a pas voulu se nommer.

David Cameron planche maintenant sur un plan d'urgence, au cas où BP s'effondre à la Bourse ou soit la cible d'une offre d'achat hostile, selon le quotidien The Times. Il tentera de sauver son avenir lors d'une réunion de crise avec Barack Obama, à Washington le 20 juillet.

Une aide financière est hors de question pense Adam Nelson, un courtier de 45 ans. «Le gouvernement n'a plus d'argent, nous avons déjà tiré plusieurs banques de la faillite», dit-il.

Pour Jools Bage, l'important est de sauver la relation entre les États-Unis et son pays. «Nous sommes plus près des Américains que de l'Europe. Ce serait dommage si notre alliance se désintégrait», dit-il.