Le gouvernement allemand a dévoilé lundi les principaux axes d'un budget 2011 de grande rigueur devant permettre d'économiser 11 milliards d'euros et objet d'un énième bras de fer entre conservateurs et libéraux de la coalition d'Angela Merkel.

Ce budget, concocté au cours de deux jours de négociations houleuses, n'épargnera quasiment aucun secteur, hormis l'éducation et la recherche où les investissements doivent assurer la croissance future, et les sacro-saintes retraites, selon les plans de Berlin.

La crise financière ayant vidé les caisses allemandes, le but est de comprimer les dépenses au maximum pour réduire le déficit public, qu'une nouvelle clause constitutionnelle oblige à alléger radicalement d'ici 2016.

«La situation est grave» et «avoir des finances solides constitue la meilleure des préventions» face aux crises futures, a argué Mme Merkel en présentant ce projet qui doit être adopté d'ici fin juin en conseil des ministres et en juillet au parlement.

Le gouvernement va tailler dans les dépenses de défense, où la suppression de 40 000 soldats dans la Bundeswehr est envisagée, et sociales, ces dernières représentant plus de la moitié des dépenses publiques. Certaines allocations seront supprimées, par exemple aux chômeurs, ou encore aux bénéficiaires de l'aide au logement.

En outre, d'ici 2014, entre 10 000 et 15 000 emplois disparaîtront dans la fonction publique. Le droit des faillites va être révisé pour que l'État créancier soit servi en premier en cas de liquidation. Et certains projets vont être abandonnés ou reportés, comme la reconstruction controversée d'un château à Berlin.

Pour créer des rentrées fiscales, une taxe est prévue sur les gains que les producteurs d'électricité tireront de l'allongement promis de la durée de vie des centrales nucléaires, et une autre sur les billets d'avions au départ d'Allemagne.

Le gouvernement Merkel évalue à 86 milliards d'euros les économies budgétaires nécessaires jusqu'en 2014, qui iront chaque année crescendo.

Ce plan, le plus rigoureux de l'après-guerre, doit également servir l'objectif allemand de ramener d'ici 2013 le déficit public (3,3% du PIB en 2009 et plus de 5% attendus en 2010) et la dette (73,2% du PIB en 2009) dans les clous du Pacte de stabilité européen, qui fixe comme limites respectives 3% et 60%.

Le budget 2011 a été enfanté dans la douleur. Les Libéraux ont menacé durant le week-end de claquer la porte du gouvernement si les conservateurs persistaient à vouloir relever certains impôts, à rebours des promesses électorales, selon la presse.

La chancelière et son ministre des Finances Wolfgang Schäuble envisageaient aussi de relever la TVA sur certains produits et d'augmenter le prix du tabac.

«La bonne nouvelle, c'est qu'il n'y aura ni hausse de TVA ni hausse d'impôts», a pavoisé le vice-chancelier libéral Guido Westerwelle lundi.

Mme Merkel, qui accumule les coups durs sur le front politique avec un mauvais score aux régionales de mai en Rhénanie (ouest) ou encore la démission surprise du président Horst Köhler la semaine dernière, a dû céder sur ce front.

La population, obnubilée elle aussi par l'équilibre des comptes, semble accueillir avec résignation la cure de minceur, après avoir déploré les coûteux plans de sauvetage de la Grèce et de l'euro, selon les sondages.

Au-delà des frontières toutefois, certains craignent que la première économie d'Europe ne freine la reprise mondiale à trop vouloir se serrer la ceinture.

Le secrétaire d'État américain au Trésor Timothy Geithner a plusieurs fois récemment appelé l'Allemagne à stimuler davantage sa demande intérieure pour aider la croissance mondiale. Mais Berlin a d'autres priorités.