La chancelière allemande Angela Merkel a expliqué jeudi vouloir convaincre ses partenaires du G20 le mois prochain à Toronto du bien fondé d'une taxation sur les marchés financiers, appelant ceux d'entre eux moins touchés par la crise à se rallier à sa cause.

Alors qu'elle parlait mercredi encore de «s'engager» pour un impôt sur les activités financières, la chancelière conservatrice est passée à la vitesse supérieure jeudi en promettant de «faire campagne» auprès des autres dirigeants des 20 pays les plus puissants du monde, réunis en sommet fin juin dans la métropole canadienne.

«Il ne faut pas être particulièrement perspicace pour deviner que ce n'est pas quelque chose sur lequel nous nous accorderons dès le dîner le premier soir ... mais je ne pense pas que cela ruinerait les marchés si nous introduisions une taxe internationale, et je vais faire campagne pour cela», au sommet du G20, a déclaré Mme Merkel lors d'une conférence sur la régulation des marchés financiers organisée par le gouvernement allemand.

La chancelière ne se prononce pas sur la nature de la taxe qu'elle souhaite, évoquant indifféremment une taxe sur les transactions financières, qui verrait le prélèvement d'une portion fixe du montant de toutes les transactions sur les marchés, et une taxe sur les activités financières, telle que proposée par la Fonds monétaire international (FMI).

Prélevée sur la somme des profits et rémunérations, celle-ci serait une sorte de taxe sur la valeur ajoutée du secteur financier.

Quoiqu'il en soit «ma requête au G20 et à la présidence sud-coréenne est: même si vos pays n'ont pas été particulièrement concernés par ces tendances, la tâche est de faire avancer les choses globalement, et je pense que c'est une tâche qui doit être accomplie aussi dans les pays qui n'ont pas été touchés par la crise», a plaidé Mme Merkel.

L'idée d'une taxation du secteur financier est sur la table depuis novembre dernier, et le G20 s'est penché dessus lors de sa dernière réunion à Washington en avril, les dissensions entre pays apparaissant alors au grand jour.

Depuis la situation a évolué. Il ne s'agit plus seulement de faire passer à la caisse les banques que beaucoup d'État ont dû mettre sous perfusion au coeur de la crise financière.

La zone euro vacille et les marchés sont «hors de contrôle», selon le ministre allemand des Finances Wolfgang Schäuble. Dans ce contexte, les gouvernements européens, Berlin en tête, veulent non seulement tenter de compenser les coûts faramineux du sauvetage des pays européens les plus fragiles, mais aussi tenter de mettre un frein à la frénésie spéculatrice.

Pour José Vinals, directeur du département marché monétaire et des capitaux du FMI, «certains pays ne verront peut-être pas le nécessité de mettre en oeuvre une telle réforme... mais personne ne sait où la prochaine crise frappera». Certains pour le moment peu affectés «pourraient se retrouver à l'épicentre de la prochaine crise», a-t-il prévenu.

Parmi les opposants à une taxation du secteur financier, le Brésil avait exprimé de grosses réserves le mois dernier. Mais même en Europe, l'idée ne fait pas que des émules.

La France aussi s'est montrée prudente pour le moment sur un mécanisme supplémentaire.

«Il ne doit y avoir aucune discrimination ni aucun avantage comparatif pour les banques ou les institutions financières qui resteraient en dehors du champ de taxation», a plaidé la ministre des Finances Christine Lagarde.

M. Schäuble a indiqué mercredi qu'il envisagerait d'appliquer une telle taxe à la seule zone euro si un accord à plus large échelle n'était pas possible.