La Grèce ne parvient toujours pas à convaincre les marchés, qui lui font désormais payer très cher le financement de ses déficits, plaçant le gouvernement d'Athènes dans une situation très délicate avant le lancement prévu de plusieurs nouveaux emprunts.

Poursuivant leur hausse depuis mardi, le taux des obligations grecques à dix ans a atteint jeudi le niveau historique de 7,508%, du jamais vu depuis l'adoption de l'euro par la Grèce en 2001.

Cela signifie que la Grèce doit actuellement débourser plus du double de l'Allemagne, référence des marchés, pour financer ses déficits. Dans ces conditions, les experts expriment désormais ouvertement leurs inquiétudes sur la capacité du pays à faire face à la crise financière dans laquelle il est plongé depuis des mois.

La situation en Grèce a également continué à peser sur l'euro, qui continuait à baisser jeudi à la mi-journée, à 1,3299 dollars contre 1,3339 mercredi.

«Le ministre des Finances grec va avoir besoin d'argent frais. La question n'est pas s'il en a besoin, mais plutôt où il va trouver cet argent», a ainsi commenté la banque allemande Commerzbank dans une note de conjoncture.

«Alors que la prime de risque augmente, il devient de plus en plus probable que les autres pays (de la zone euro) devront prêter main forte à la Grèce», ajoute cette note.

Mais l'Europe, Allemagne en tête, ne semble toujours pas prête à s'engager, et les conditions de déblocage de l'aide européenne décidée il y a quinze jours, avec l'appui du Fonds monétaire international (FMI), ne sont toujours pas éclaircies.

«C'est vrai que la situation actuelle est tendue, et on se demande où on en est sur le plan d'aide UE-FMI», a ainsi indiqué Padhraic Garvey, analyste à la ING Rates Strategy.

Selon la presse allemande, la Bundesbank a également exprimé son scepticisme face au plan de soutien, indiquant que «cet accord des chefs d'Etat européens, qui a été trouvé sans consultation des banques centrales à notre connaissance, contient des risques pour la stabilité qui ne doivent pas être sous-estimés».

Le plan d'aide est «viable», a cependant jugé jeudi le président de la Banque centrale européenne (BCE) Jean-Claude Trichet, avant d'ajouter qu'un défaut de paiement de la Grèce est «hors de question».

Selon certains analystes, le recours au FMI, seule institution en mesure de débloquer les fonds nécessaires à des taux raisonnables pour la Grèce, prend donc chaque jour plus de consistance.

«L'Etat grec a besoin d'un chevalier blanc porteur de fonds, et tout indique que seul le FMI est mesure de remplir ce rôle», a indiqué à l'AFP une source bancaire grecque.

«La situation est très tendue, le plan d'aide européen est très imprécis, les marchés attendent que le pays fasse recours au FMI», a indiqué à l'AFP Manos Hatzidakis, analyste de la société de courtage Pigasos.

Le ministère grec des Finances s'est toutefois efforcé jeudi de ramener le calme en affirmant que la Grèce continuerait à emprunter sur les marchés en dépit de cette hausse historique des taux.

Ayant déjà emprunté fin mars à des taux de plus de 6%, l'Etat grec n'a pas exclu une émission obligataire en dollars afin de lever 11,5 milliards d'euros (15,6 milliards de dollars) et couvrir les besoins d'ici mai.

Les craintes des analystes sont d'autant plus fortes que le ministre des Finances Georges Papaconstantinou a reconnu mardi soir que le déficit public pour 2009 serait révisé «au moins à 12,9%» du PIB contre 12,7% actuellement.

L'aggravation de la crise a fait chuter la Bourse d'Athènes jeudi, dont l'indice vedette a plongé de 5% en milieu de journée.