Une juge fédérale argentine a ordonné vendredi le rétablissement dans ses fonctions du chef de la Banque centrale, Martin Redrado, limogé la veille par un décret présidentiel, a annoncé la justice.

«Je retourne travailler à la Banque. Justice a été faite», a dit M. Redrado à la presse en arrivant au siège de l'institution, où l'attendait une foule de journalistes, avant de retrouver ses bureaux de directeur.

«La magistrate a décidé de suspendre provisoirement l'application du décret d'urgence qui avait limogé le fonctionnaire», avait annoncé quelques minutes auparavant le Centre d'information judiciaire, un organe officiel de la Justice.

La présidente argentine Cristina Kirchner avait ouvert jeudi une crise institutionnelle en limogeant par décret M. Redrado «pour avoir manqué à ses devoirs», malgré le statut d'indépendance de la Banque centrale, une décision condamnée par des juristes.

La veille au soir, après la publication du décret le limogeant, M. Redrado avait fait savoir qu'il quittait ses fonctions mais ne démissionnait pas et allait porter rapidement l'affaire devant les tribunaux.

Vendredi matin, son avocat, le juriste Gregorio Badeni, avait interposé un recours en justice pour obtenir l'annulation du décret d'urgence de Mme Kirchner. Quelques heures plus tard, la juge Maria José Sarmiento donnait suite à sa demande.

Le gouvernement avait annoncé que le vice-président de la Banque centrale, Miguel Angel Pesce, prendrait la présidence de l'institution en attendant l'arrivée d'un nouveau responsable. Or, la juge ayant annulé le décret présidentiel, on revient à la situation antérieure dans laquelle M. Redrado était le président de la banque.

«Personne ne peut empêcher Martin Redrado d'assumer à nouveau ses fonctions de président de la Banque centrale après cet arrêt», a dit son avocat, le juriste Gregorio Badeni.

La même juge avait décidé plus tôt de suspendre un autre décret présidentiel autorisant l'utilisation de réserves de la Banque centrale pour régler la dette arrivant à échéance en 2010.

Cette mesure pourrait également permettre à l'opposition d'organiser sa riposte au Congrès, où le parti péroniste a perdu sa majorité aux législatives de juin.

Le vice-président (radical) Julio Cobos, opposé à Mme Kirchner depuis la longue crise des agriculteurs en 2008, a suspendu ses vacances au Chili et a regagné son bureau du Sénat où il a reçu vendredi les chefs des différents groupes parlementaires de l'opposition.

La présidente reprochait à M. Redrado de tarder à mettre à disposition de l'exécutif 6,5 milliards de dollars prélevés sur les réserves pour payer la dette en 2010, une décision prise par décret présidentiel. Le chef de la Banque centrale voulait d'abord examiner toutes les conséquences juridiques pour l'institution d'une telle décision.