La Banque centrale européenne (BCE) va garder ses taux inchangés jeudi et en a peut-être définitivement terminé avec ses baisses malgré une inflation tombée à zéro et une économie de la zone euro toujours déprimée.

La grande majorité des économistes parient sur le maintien du taux principal à son niveau historique de 1%, jeudi, à l'issue de la réunion du conseil des gouverneurs.

Pour beaucoup, le plancher est atteint. Plusieurs banquiers centraux, dont l'influent Axel Weber, ont répété à l'envi leur réticence à voir ce taux, qui détermine les conditions du crédit en zone euro, descendre sous ce seuil, rejetant une politique de taux zéro à l'américaine.

Certains continuent d'espérer, à l'instar d'Erik Nielsen, de Goldman Sachs, qui n'exclut pas jeudi une indication d'une future baisse de taux. Le président de la BCE, Jean-Claude Trichet, pourrait par exemple ne pas réitérer sa déclaration antérieure, selon laquelle les taux sont «adaptés», souligne l'économiste qui mise sur une diminution de 0,25 point de pourcentage du principal taux à 0,75% en juillet.

Le Français n'a d'ailleurs pas totalement exclu cette option.

Réduire de nouveau les conditions du crédit ne serait en soi pas aberrant au regard de la situation économique.

L'inflation est tombée à zéro en mai dans la zone euro, selon une estimation provisoire, et va plonger en territoire négatif dans les mois d'été. La BCE ne remplira pas cette année, et sans doute pas l'an prochain non plus, son objectif d'une inflation légèrement inférieure à 2%.

La montée du chômage, qui a atteint en avril un taux inédit depuis presque 10 ans de 9,2% en zone euro, va peser sur la consommation. Les hausses salariales vont ralentir nettement dans les trimestres à venir, ce qui renforce le risque de déflation, une baisse durable et généralisée des prix, prédit Jennifer McKeown de Capital Economics.

Si les indicateurs de confiance économiques en zone euro se redressent légèrement, laissant espérer que le pire de la récession est passé, «l'activité économique est appelée à reculer encore dans les mois à venir», souligne Alexander Krüger de la Bankhaus-Lampe.

Mais une baisse de taux pourrait aussi ne pas servir à grand chose. Depuis octobre, la BCE a réduit son taux de 3,25 points, à sept reprises, soit une baisse presque tous les mois, mais sans parvenir à rétablir la confiance entre banques, qui ne répercutent pas ou à peine ces baisses sur les crédits à leurs clients.

Comme ses consoeurs, la BCE a donc décidé de se lancer dans des mesures «non conventionnelles» pour stimuler l'économie. Elle prévoit de débourser pour 60 milliards d'euros d'obligations sécurisées, couvertes par des crédits hypothécaires et considérées comme sûres. Les détails techniques seront révélés ce jeudi.

À titre de comparaison, la Fed a lancé un programme d'achat d'obligations de 300 milliards de dollars et la Banque d'Angleterre de 125 milliards de livres. Des achats financés par de la création de monnaie.

Ce qui n'est pas pour plaire à tous, et notamment à la chancelière allemande Angela Merkel, qui a demandé mardi, dans une critique plutôt inhabituelle, aux deux institutions de mettre fin à leurs interventions. «Il faut revenir à des politiques de banques centrales indépendantes», a-t-elle lancé dans un discours à Berlin.