La Commission européenne a encore revu en baisse ses prévisions économiques lundi avec une récession attendue de 4% désormais cette année en zone euro, qui entraînera en 2010 un taux de chômage record depuis 1945 et une envolée des déficits publics.

Il s'agit de la pire récession pour le continent depuis la Deuxième guerre mondiale, plus accentuée encore qu'aux Etats-unis d'où est partie la crise financière. Et elle sera également plus longue que prévu puisque selon les estimations de l'exécutif européen la zone euro connaîtra encore une contraction de l'activité en 2010, de 0,1%.

Dans ses précédentes prévisions, publiées à la mi-janvier, Bruxelles tablait encore sur un repli plus modéré du Produit intérieur brut (PIB), de 1,9% en 2009, et surtout sur une légère croissance en 2010, de 0,4%.

«L'économie européenne est au beau milieu de sa crise la plus profonde et la plus étendue de l'après-guerre», a commenté le commissaire européen aux Affaires économiques, Joaquin Almunia.

Cependant, a-t-il dit, les statistiques montrent «des signes de stabilisation» de la conjoncture dans la zone euro, indiquant qu'elle n'est «plus en chute libre» après une phase aiguë de récession.

La situation devrait à un certain stade «commencer à se stabiliser en Europe, dans le sillage des Etats-Unis, mais elle ne l'a pas encore fait d'une manière telle que l'on pourrait dire que le creux de la vague a été atteint», a relativisé de son côté le ministre luxembourgeois des Finances Jean-Claude Juncker, en arrivant à une réunion du forum des ministres des Finances de la zone euro (Eurogroupe), qu'il préside.

Dans l'ensemble de l'Union européenne, Bruxelles prévoit également une récession plus importante qu'auparavant, de 4% cette année et de 0,1% l'an prochain, contre une contraction de 1,8% cette année et une croissance de 0,5% l'an prochain prévues jusqu'ici.

L'Europe est tirée vers le bas par l'Allemagne, son économie la plus importante, davantage frappée que les autres en raison de l'importance des exportations pour son activité, qui souffrent aujourd'hui du ralentissement mondial.

La Commission prévoit un recul du PIB de 5,4% dans ce pays en 2009. Bruxelles table par ailleurs sur une contraction de l'activité de 3% en France cette année, et de 1,4% en Pologne, ce qui a provoqué le mécontentement du ministre polonais des Finances Jan Rostowski, qui a jugé ces prévisions «erronées».

«Nos pronostics qui prévoient une croissance (en 2009) sont plus crédibles», a-t-il déclaré lundi.

Sur le plan social, la Commission s'attend par ailleurs à ce que la récession s'accompagne de 8,5 millions de pertes d'emploi dans l'Union européenne en 2009-2010, une saignée qui devrait se traduire par un taux de chômage de 10,9% l'an prochain.

Dans la zone euro, elle prévoit qu'il atteigne 11,5% en 2010, un niveau sans précédent depuis l'après-guerre selon Bruxelles.

La Commission tablait jusqu'ici l'an prochain sur un taux de chômage de 10,2% dans la zone euro et 9,5% dans l'UE.

Le ministre allemand des Finances, Peer Steinbrück, s'est dit lundi «préoccupé» par cette flambée attendue du chômage, qui va pénaliser les populations les plus fragiles et risque d'attiser la grogne sociale.

Bruxelles prévoit aussi un très fort creusement des déficits publics dans la zone euro, à 5,3% en 2009 en moyenne et 6,5% en 2010.

Sur les 16 Etats membres de la zone euro, 13 devraient dépasser l'an prochain la limite en principe autorisée de déficit de 3% du PIB, selon la Commission. Seuls la Finlande, Chypre et le Luxembourg devraient être encore dans les clous.