Ça prend quand même du culot: partir de Montréal et ouvrir un café à Paris! Et pour s'assurer que les Parisiens sachent qu'ils sont entrés dans un établissement canadien, Presse Café va leur accrocher une tête d'orignal au mur.

Le premier établissement européen de Presse Café ouvrira cet été dans le 13e arrondissement, près de la Bibliothèque François-Mitterrand et de l'Université Paris Diderot, un quartier jeune, ouvert aux nouvelles tendances.

 

«Notre seul compétiteur là-bas, c'est Starbucks», lance tout de go Marcel Hachem, fondateur et président des Cafés V. P. inc., la société-mère de Presse Café.

On pense avoir mal compris: Starbucks, le seul compétiteur à Paris, qui compte pourtant son lot de cafés? «C'est pas pareil. À partir de 10h30 dans un café parisien, ils servent de la bière et du vin. (...) Chez Presse Café ou chez Starbucks, tu peux venir quand tu veux, tu peux manger quand tu veux ou ne pas manger quand tu veux. Dans un café français, tu ne peux pas venir manger quand tu veux ou boire ce que tu veux.»

Voilà donc pour la façon de se démarquer. Pour la stratégie plus globale maintenant, il est clair aux yeux de l'homme d'affaires qui porte des complets signés Dior ou Paul Smith que Paris est une première étape dans le développement du marché européen.

Déjà, il prévoit ouvrir deux autres Presse Café à Paris d'ici la fin de l'année et est en négociations avec un fournisseur pour en ouvrir 27 autres dans des établissements publics européens, comme des aéroports. «Tout le monde attend mon premier, tout le monde veut aller voir ça.»

Pour son premier resto parisien, l'entreprise montréalaise est allée cogner à plusieurs portes, Place de l'Opéra, pas très loin du Louvre. «C'est trop cher», a vite conclu M. Hachem. «On ne peut pas faire d'argent là.»

L'Australie et Miami

Au moment où vous lirez ceci, M. Hachem doit d'ailleurs être à Paris avec son constructeur, pour étudier davantage les lieux. Les décors, dont la fameuse tête d'orignal, seront construits ici. «On prend nos gars d'ici, on se sent plus en sécurité.»

De toute façon, ajoute-t-il, entre expédier un conteneur de décors en France ou emplir un camion et l'acheminer à Edmundston, au Nouveau-Brunswick, les coûts sont similaires.

Le marché européen n'est pas le premier pas international de M. Hachem. Début mars, après des négociations qui ont duré cinq ans, dont trois sérieusement, Presse Café a ouvert son premier établissement en Australie. Sur l'affiche, on peut lire: Presse Café, Montréal, Paris, Sydney.

Fidèle à la politique de l'entreprise, c'est un maître franchisé qui a les droits pour le pays et qui a comme mandat de développer le marché en respectant le concept, mais avec une certaine liberté aussi. «Il faut donner une touche personnalisée aux gens, ils sont chez eux», résume celui qui a ouvert le premier Presse Café en 1996.

Depuis, malgré les autres marques du groupe, comme Café Vienne ou les restaurants Ros&Lina, Presse Café est celle qui occupe le temps du président, celle par où passe la croissance. Ces deux prochaines années, il prévoit en ouvrir une vingtaine d'autres, soit une augmentation de 40% en deux ans.

Au début des années 2000, Presse Café avait tenté une incursion à Toronto. Au bout du compte, l'entreprise a dû fermer deux de ses cafés. Mais l'expérience a été riche en apprentissages. Quand on lui demande un exemple, M. Hachem se tire une oreille: «Les oreilles, dit-il. Écouter le consommateur.»

Et la récession dans tout ça, cette question qui est sur les lèvres de tous les entrepreneurs? Il la voit plutôt comme un avantage: les baux peuvent être moins chers, comme les coûts de construction. En plus, lui qui songe aussi à ouvrir des cafés en Alberta, peut maintenant trouver des personnes intéressées à travailler dans ses éventuels bistros.

Et il vient de sortir une ligne de sandwichs au poulet à 3,95$. Ce que les clients cherchent, c'est «un bon repas, un bon café, à un bon prix». Et c'est encore plus vrai en période de récession.

 

L'entreprise

Les Cafés V.P. inc. comptent une cinquantaine de restos Presse Café, dont seulement trois sont corporatifs. Tous les autres appartiennent à des franchisés. Le groupe détient aussi les droits sur les bannières Café Vienne, Green Traiteur et Café, Premium, Ros&Lina et Cupps, eux aussi très majoritairement franchisés.

Stratégie

Développer des marchés étrangers en s'associant à des maîtres franchisés qui auront les droits pour différents pays, différentes régions. En plus, continuer à développer le marché local.

Défis

Trouver des gens de confiance qui sauront porter la marque dans des pays aux cultures différentes. «C'est le grand secret de la réussite», dit M. Hachem. Aussi, savoir s'adapter aux marchés locaux sans y perdre son âme. Dans certains cas, faire face à des concurrents déjà bien établis.