Le Delta Centre-Ville, sur la rue University à l'entrée sud du centre-ville de Montréal, fermera ses portes le 31 octobre prochain. Le troisième établissement hôtelier en importance dans la région vient d'être vendu à une coentreprise internationale, dont l'identité n'a pas été révélée hier.

L'acquéreur envisage de donner une nouvelle vocation au bâtiment, voisin de l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI).

La nouvelle a pris par surprise l'industrie, y compris les consultants les mieux renseignés sur l'actualité hôtelière.

Pour comprendre la transaction, il faut s'attarder à l'aspect immobilier davantage qu'à l'aspect hôtelier, estime Peter Gaudet, associé senior chez Horwath Consultants. «Ça se peut qu'il y ait plus de valeur en immobilier qu'en hôtellerie», a-t-il dit dans un entretien avec La Presse.

Le Delta Centre-Ville n'avait toutefois pas à rougir de sa performance dans le marché montréalais, selon les deux spécialistes que nous avons joints. «Il performait dans la moyenne», ajoute M. Gaudet. Cela dit, l'investissement hôtelier n'est toutefois pas l'investissement immobilier le plus rentable qui soit à Montréal.

«Le taux d'occupation hôtelier à Montréal, qui tourne autour de 60% à 65%, est moindre que dans les grands centres urbains où le taux peut atteindre 90%», souligne le consultant Serge Choinière, directeur de projets chez DAA Stratégies.

Avec ses 711 chambres, le Delta Centre-Ville est le troisième hôtel en importance de la région après le Reine Elizabeth et le Centre Sheraton, mais devant le Hyatt Regency de la Place Desjardins et le Marriott Château Champlain, selon Horwatt.

Avec sa fermeture, c'est près de 3% de l'offre qui disparaît d'un coup, l'île de Montréal comptant 25 700 chambres.

Emplacement de choix, mais forte concurrence

L'établissement, connu pour son restaurant panoramique tournant au sommet, dispose d'un emplacement de choix avec l'essor du Vieux-Montréal et du Quartier international.

«Par contre, on a plus de concurrents avec les hôtels Westin, Embassy Suites et Dauphin, qui ont tous ouvert dans le secteur. Le Delta Centre-Ville est probablement un hôtel qui avait besoin de rénovations pour rester dans le marché», souligne Peter Gaudet.

Près de 3000 nouvelles chambres se sont ajoutées au parc hôtelier montréalais ces dernières années.

Par ailleurs, le gestionnaire de l'hôtel Delta a précisé dans un communiqué ne pas avoir participé à la décision de fermer l'établissement. Les clients qui ont réservé à une date ultérieure au 31 octobre sont invités à loger au Delta Montréal, sur l'avenue Président-Kennedy.

Delta se propose d'offrir un soutien aux employés qui perdront leur emploi et essaiera de les affecter, si possible, dans ses autres établissements. Environ 350 emplois syndiqués auprès de la Confédération des syndicats nationaux disparaissent. La convention collective arrive à échéance en octobre 2016.

Dans un communiqué, le vendeur InnVest Reit affirme avoir vendu le Delta Centre-Ville ainsi qu'un complexe multiusage à Sherbrooke pour 71,6 millions de dollars. De cette somme, 51 millions serviront au remboursement de la dette. Les frais de clôture de la transaction s'élèvent à 9 millions.

InnVest possède 134hôtels au Canada et 17 000 chambres. Environ le cinquième de son portefeuille est situé au Québec.

En ce qui concerne la vocation future de l'immeuble, les deux experts contactés n'excluent aucun scénario. À Montréal, les hôtels Renaissance, sur l'avenue du Parc, Courtyard by Marriott et le 4 Points by Sheraton ont tous été convertis en résidences de l'Université McGill.

Autre cas de figure possible, la conversion d'hôtel en tour de logements locatifs. Deux exemples: le Château Royal, sur Crescent, et le Clarion Manoir Lemoyne ont retrouvé leur vocation d'origine dans les dernières années après avoir été auparavant convertis en hôtel.

Ces jours-ci, le Groupe Savoie transforme l'ancien hôtel Crown Plaza, au métro Sherbrooke, pour en faire une Résidence Soleil, pour personnes âgées en perte d'autonomie.

Dans le cas du Delta Centre-ville, Serge Choinière croit possible que l'acquéreur décide d'y aménager des copropriétés, un type de projet en vogue au centre-ville. «C'est d'autant plus facile que la plomberie et l'électricité sont déjà présentes dans toutes les unités», fait-il remarquer.

L'hôtellerie à Montréal

> 25 700 chambres sur l'île de Montréal

> Taux d'occupation en 2012: 66, 2%

> Tarif moyen en 2012: 138,20$

Source: AHGM