La maison que vous convoitez fait-elle l'objet d'une reprise de finance? Il sera plus difficile pour les acheteurs de le savoir, puisque la SCHL demande désormais aux courtiers immobiliers de cacher cette information sur les fiches descriptives des propriétés.

La Société canadienne d'hypothèques et de logement (SCHL) a lancé cette nouvelle directive surprenante aux différentes chambres immobilières du pays il y a quelques mois, a révélé hier le Financial Post. Une requête qui a fait sourciller la Fédération des chambres immobilières du Québec (FCIQ).

En vertu des règlements québécois, un courtier est obligé de divulguer à l'acheteur une série d'informations, notamment le fait que la maison fait l'objet d'une saisie bancaire. Pour clarifier la demande inusitée faite par la SCHL, la FCIQ a envoyé une note à ses 14 000 membres le mois dernier.

Dans ce document, que La Presse Affaires a obtenu, la FCIQ souligne que cette nouvelle politique fédérale «va à l'encontre des règles déontologiques qui stipulent que les courtiers immobiliers ont l'obligation de publier des renseignements véridiques et vérifiés sur une propriété».

Après une vérification avec les autorités réglementaires provinciales, la FCIQ a toutefois accepté de se plier à la demande de la SCHL, du moins en partie. Les courtiers québécois seront libres d'indiquer si une maison fait l'objet d'une reprise sur la fiche descriptive, ou par un autre moyen de leur choix.

Pourquoi?

Pourquoi la SCHL demande-t-elle aux associations de courtiers de tout le pays de cacher une information aussi importanteque l'existence d'une saisie bancaire? L'organisme cherche d'abord à protéger ses arrières, croient divers observateurs.

La SCHL est un immense assureur de prêts hypothécaires au Canada. Elle assure une bonne partie des prêts contractés par les acheteurs qui mettent moins de 20% de comptant à l'achat d'une propriété. La valeur totale de toutes ces garanties frôle les 600 milliards de dollars.

Or, les maisons saisies par les banques se vendent souvent moins cher que les résidences traditionnelles. Si le marché immobilier canadien devait chuter de façon marquée - avec le tsunami de reprises bancaires que cela suppose -, les pertes pourraient se calculer en milliards pour la SCHL, croient divers analystes. D'où l'intérêt de la SCHL de vouloir camoufler l'existence même des reprises de finance au Canada, avancent-ils.

La SCHL se défend

Dans une lettre envoyée hier au rédacteur en chef du Financial Post, la SCHL se défend d'avoir mal agi dans ce dossier. «Il n'existe aucune disposition qui exige que le vendeur divulgue dans une inscription la raison pour laquelle la propriété est mise en vente», a écrit Mark McInnis, vice-président, souscription, lignes de conduite et administration de l'assurance.

«La SCHL n'a pas donné instruction à ses agents d'enfreindre une quelconque règle de droit ou norme éthique», a-t-il poursuivi.

L'organisme reconnaît néanmoins que dans le but «d'obtenir le meilleur prix possible et de réduire au minimum les pertes, la SCHL demande aux courtiers de ne pas indiquer dans l'inscription de la propriété qu'il s'agit d'une saisie».

«L'information que la SCHL est le vendeur et la raison pour laquelle celle-ci effectue la vente sont toujours indiquées aux acheteurs éventuels qui envisagent de faire une offre sur la propriété», affirme en outre M. McInnis.