À peine 35% des aspirants courtiers immobiliers réussissent l'examen nécessaire à l'obtention d'un permis au Québec, un taux de succès deux fois plus faible qu'il y a deux ans.

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Ce plongeon est une conséquence directe de l'adoption de la nouvelle Loi sur le courtage immobilier en mai 2010, qui a rehaussé le niveau de difficulté des tests. Or, comme la formation n'est plus obligatoire, plusieurs candidats se présentent aux examens très mal outillés.

«Je suis inquiet de voir que les gens ne sont pas préparés, ça m'inquiète énormément», a dit Robert Nadeau, président et chef de la direction de l'Organisme d'autoréglementation du courtage immobilier du Québec (OACIQ), lors d'une entrevue récente à La Presse Affaires. «Ils pensent que ça va être facile et ça ne l'est pas.»

Nombreux candidats

De nombreux candidats s'inscrivent à une formation - facultative mais recommandée - et n'y assistent pas, révèle un sondage interne mené par l'OACIQ. «Ils vont acheter le matériel et ils pensent que c'est suffisant, a indiqué M. Nadeau. Il y en a qui se font dire: je vais te préparer en une fin de semaine. Ils ne passent pas non plus, ces gens-là.»

Selon l'ancienne loi, les aspirants courtiers devaient réussir un examen de trois heures à choix multiples au terme d'une formation obligatoire. Ce test - dont le taux de réussite était d'environ 75% - leur donnait droit à un permis de plein exercice, qui leur permettait de pratiquer tant le courtage résidentiel qu'hypothécaire.

Pour réussir les nouveaux tests, les candidats doivent être capables de résoudre plusieurs problèmes concrets, comme la rédaction d'un contrat de courtage et d'une promesse d'achat. «Juste en matière résidentielle, c'est six heures d'examen, a souligné M. Nadeau. Si je veux avoir un permis de plein exercice comme autrefois, il faut que j'ajoute au moins six heures d'examen. C'est deux jours.»

Le coût de l'examen en courtage résidentiel est de 512$ avant les taxes. Après trois échecs, les candidats doivent attendre au minimum un an avant de tenter leur chance de nouveau.

Plusieurs instituts offrent des formations d'environ 300 heures en vue de préparer les élèves aux tests de l'OACIQ. Ces cours coûtent plus ou moins 3700$.

Écoles problématiques

Le président de l'OACIQ dénonce l'attitude de certains instituts d'enseignement dans les mois qui ont précédé l'entrée en vigueur de la nouvelle loi.

Au printemps 2010, plusieurs écoles ont lancé de vastes campagnes publicitaires à la radio afin d'attirer les élèves avant qu'il ne soit trop tard - c'est-à-dire avant que les examens deviennent plus difficiles. Cette façon de faire a provoqué une ruée et attiré environ 4000 nouveaux courtiers en très peu de temps dans la profession.

Pourtant, l'OACIQ demandait depuis cinq ans aux écoles de se préparer au nouveau régime, affirme Robert Nadeau.

«Mais les maisons d'enseignement, quand la manne est arrivée avant 2010, elles ont dit: moi, je forme sur l'ancien, je me dépêche et quand j'aurai du temps, je penserai au nouveau. Mais elles n'ont pas préparé leurs élèves aux nouveaux examens. Dans les collèges qui l'ont fait, les élèves réussissent; dans ceux qui ne l'ont pas fait, les élèves ne réussissent pas.»

Robert Nadeau estime qu'un taux de réussite de 60% aux examens «serait très convenable» et dit que l'OACIQ offre son soutien aux maisons d'enseignement. Les choses pourraient changer de façon plus importante puisqu'un projet de formation obligatoire est dans l'air.

Dans les agences

Les courtiers qui ont passé le nouvel examen de l'OACIQ se démarquent-ils dans les agences? Nathalie Clément, directrice de Via Capitale du Mont-Royal, dit observer une «légère différence» parmi ses nouveaux employés.

«En général, ils ont des connaissances un peu plus approfondies, mais il y a l'expérience du terrain qui fait défaut», a-t-elle indiqué.

Serge Brousseau, président et propriétaire de la bannière RE/MAX du Cartier, qui emploie 250 courtiers, estime quant à lui qu'il est «un peu tôt pour observer des résultats tangibles».

Et si la nouvelle formation semble rendre les agents plus aptes, «ça n'en fait pas nécessairement de meilleurs vendeurs», a-t-il dit hier.