L'Autorité des marchés financiers (AMF) a interrompu il y a plusieurs mois la vente des condos du projet ZERO 1, du Groupe Cholette, le temps de mener une «analyse» sur la régularité du mode de vente des appartements.

Cholette a lancé au printemps 2010 ce projet de 165 logements, situé dans une ancienne résidence étudiante à l'angle des boulevards René-Lévesque et Saint-Laurent. Le complexe de type «condotel» vise à offrir un pied-à-terre aux propriétaires, qui ont aussi la possibilité de louer leur appartement lorsqu'ils sont absents en vue d'en tirer un revenu.

Le hic, c'est que Cholette aurait dû faire approuver son projet auprès de l'AMF avant de mettre les condos en vente, car l'achat d'une telle propriété constitue une forme de placement financier en vertu des lois québécoises.

«L'Autorité des marchés financiers intervient dans ce dossier puisque le projet en question fait appel à des contrats d'investissement qu'une personne, intéressée par un tel projet, peut acheter auprès du groupe Cholette, a expliqué Sylvain Théberge, porte-parole de l'AMF. Il s'agit donc ici d'un contrat d'investissement avec espoir de rendements futurs, ce qui tombe sous le sceau de la Loi sur les valeurs mobilières du Québec.»

L'AMF a indiqué être en «processus de normalisation» du dossier, tout en refusant de préciser si des sanctions pourraient être imposées contre le Groupe Cholette. Selon nos informations, l'Autorité a interrompu à l'automne 2010 la vente des condos, qui allait bon train à ce moment-là avec plus d'une centaine de logements écoulés.

Des acheteurs ont depuis annulé leur promesse d'achat, devant l'incertitude qui entoure la suite du projet.

Changement de concept

Le concept du ZERO 1 a quelque peu changé après la mise en vente des premiers condos. Au départ, les appartements étaient offerts sur le marché libre, mais, devant la demande de nombreux acheteurs qui souhaitent louer leurs logements, la formule s'est transformée en condotels, a expliqué Mathieu Collette, directeur de l'agence de services immobiliers Altus, qui a déjà collaboré au projet. C'est à ce moment que l'AMF s'est penchée sur le dossier.

«Idéalement, il aurait fallu qu'ils (Cholette) mettent en marché un condotel, qu'ils fassent les présentations à l'AMF, que ce soit autorisé et qu'après ça, ils mettent en vente, a indiqué M. Collette. Ils ont bousculé un peu les choses, ils ont changé la formule et l'AMF a été un peu frileuse par rapport à ça. Là, ils sont en train de démontrer la bonne rentabilité éventuelle d'un tel projet.»

Le Groupe Cholette attend avec impatience la décision de l'AMF, qui déterminera de quelle façon - et selon quels paramètres - les condos pourront être vendus à l'avenir. Il est probable que les contrats des logements déjà écoulés devront être refaits.

D'ici à ce que l'Autorité tranche, le directeur général des ventes du Groupe Cholette, Serge Bizien, a préféré restreindre ses commentaires. «Le dossier est entre les mains de l'AMF depuis plusieurs mois, il en est à sa phase aboutissante et, conséquemment, on est tenu par les règles de l'AMF à savoir comment se concluront les transactions», a-t-il dit à La Presse Affaires hier.

Histoire mouvementée

Il s'agit d'un nouveau rebondissement dans l'histoire mouvementée de cet immeuble de 12 étages du Red light, construit en 2001 par la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJBM). À l'époque, l'organisation avait lancé ce projet immobilier - appelé Maison du prêt d'honneur - pour y loger des résidences étudiantes.

Or, les coûts de construction ont vite explosé. Ils sont passés de 12 à 21 millions de dollars, si bien que la SSJBM a dû se résigner un an plus tard à céder le projet au cégep du Vieux-Montréal, qui y a logé ses propres étudiants.

Faute de rentabilité, le cégep a dû à son tour revendre l'immeuble à perte en 2007. Le nouveau propriétaire - Cholette - a par la suite rénové de fond en comble l'intérieur du bâtiment et y a par la suite lancé son projet de copropriété. Les appartements, d'une taille de 220 à 378 pieds carrés, se sont vendus à partir de 88 500$ avant les taxes.