Des pommes et des oranges

Cette méthode de calcul, aussi précise soit-elle, compare des pommes et des oranges, critique Éric Brassard: le logement et la maison ne sont jamais semblables. «La rentabilité de la maison, ce n'est pas la véritable raison de l'achat, ajoute-t-il. La vraie question, c'est: je veux un chez-moi à mon coût, qui me convient, selon mes valeurs.»

Qu'un logement soit loué ou acheté, son coût dépend des avantages qu'il procure: plus il est grand, bien situé, bien aménagé, agréable, plus il est cher.

À loyer: un drame?

La location n'est pas un obstacle à une retraite confortable. «La retraite n'est pas à l'eau, insiste Éric Brassard. Les gens pensent qu'à loyer, on lance l'argent par les fenêtres et qu'avec une maison, on économise.» C'est une question de choix et de discipline.

«La location n'est pas du tout tragique pourvu que les gens se prennent en main, épargnent quand même et qu'ils gèrent leurs trois risques.» Rappelons-les: manquer d'argent à court terme, connaître une malchance majeure comme une invalidité soudaine, manquer d'argent à la retraite.

La propriété rapporte-t-elle à long terme?

«Au net, la propriété entraîne un coût», insiste encore Éric Brassard.

«Au cours des 10 dernières années, être propriétaire n'a pas coûté cher, et quelquefois moins que d'être locataire, reconnaît-il. Mais ç'a coûté quelque chose quand même.»

Il tient à préciser: «Je ne suis pas contre la propriété. Ce serait comme être contre la crème glacée.»

La propriété est-elle une épargne forcée?

Marie-Hélène Legault, qui donne le cours d'accès à la propriété à l'ACEF de l'est de Montréal et est chargée du cours d'économie immobilière à l'UQAM, observe que l'achat d'une propriété est une manière de faire de l'épargne forcée. «Plusieurs personnes m'ont dit que si elles n'avaient pas acheté leur maison, elles n'auraient jamais été capables d'épargner autant», constate-t-elle.

En effet, l'obligation d'une mensualité hypothécaire constitue pour certains la seule manière de limiter leurs dépenses. «Mais ce n'est pas le summum des finances personnelles», estime Éric Brassard. Si l'objectif est d'accumuler de l'épargne pour la retraite, d'autres moyens de se discipliner existent: les retraits planifiés et l'épargne systématique, par exemple.

«Beaucoup de propriétaires ont des problèmes, constate-t-il par ailleurs. S'ils n'ont rien épargné parce qu'ils ont acheté trop gros et qu'ils assument des coûts énormes toute leur vie, c'est catastrophique.»

Entre 2001 et 2008 (dernières données disponibles), le revenu disponible moyen des «unités familiales « québécoises est passé de 40 040$ à 49 563$, soit une hausse moyenne de 3,1% par année.

Dans la région de Montréal, le loyer moyen d'un logement de deux chambres à coucher a augmenté à peu près au même rythme, passant de 529$ en 2001 à 710$ en 2010, pour une augmentation annuelle moyenne de 3,1%.

Pendant ce temps, le prix moyen des maisons unifamiliales sur le marché de la revente dans la région du Grand Montréal a crû trois fois plus vite. Il a bondi de 112 500$ en 2001 à 252 000$ en 2010 une hausse moyenne de 9% par année. Les copropriétés ont pour leur part bondi de 95 000$ à 210 000$, là aussi une hausse de 9% par année.