C'est comme si la récession était déjà loin derrière. Le secteur immobilier est en feu au pays, si bien que les analystes ont dû dépoussiérer leurs boules de cristal et revoir complètement leurs prévisions.

Et on ne parle pas de petites révisions. Pas plus tard qu'en mai dernier, l'Association canadienne de l'immeuble (ACI) prédisait que le nombre de reventes de maisons dégringolerait de 14,7% cette année. Rectification de tir majeure, hier: la baisse, finalement, ne devrait atteindre que 0,4%.

«Ce sont de grosses révisions, a admis hier Gregory Klump, économiste en chef à l'ACI. Le rebond a été vraiment spectaculaire, tant par sa rapidité que son amplitude.»

Ce qui a motivé les économistes à revoir leurs prévisions, ce sont les ventes vigoureuses du deuxième trimestre, qui ont poursuivi leur lancée au début du troisième. «La différence entre le marché de la revente actuel par rapport au début de l'année est comme le jour et la nuit», a dit M. Klump à La Presse Affaires.

Ce rebond est particulièrement spectaculaire dans l'Ouest et en Ontario, où le marché a dégringolé rapidement... avant de remonter rapidement.

En Colombie-Britannique, les prévisions des analystes de l'ACI ont complètement changé de cap. Alors qu'on prévoyait une baisse de 18,7% du nombre de transactions pour 2009, on prédit maintenant une hausse de 5,2%. Même chose en Ontario, qui passe d'une prévision à la baisse de 12,7% à une prévision à la hausse de 0,5%.

L'Alberta améliore aussi considérablement ses prévisions, passant d'une baisse majeure de 24,7% à une légère baisse de 2,5%. Le Québec n'échappe pas à la tendance. L'ACI prévoit que le nombre de transactions baissera de 2% en 2009, alors qu'elle tablait sur un plongeon de 10,8% en mai.

«Nous aussi on a revu nos prévisions à la hausse, autant pour les transactions et les constructions neuves que pour les prix», dit d'ailleurs Hélène Bégin, économiste principale au Mouvement Desjardins, qui étudie le marché québécois.

«Le marché s'est redressé beaucoup plus rapidement que prévu et on a été déjoué, comme la plupart des analystes», ajoute-t-elle.

Pour ce qui est des prix, le recul généralisé qui a balayé le Canada (mais épargné le Québec) semble ainsi terminé. L'ACI prévoit une hausse des prix de 1,5% en 2009 à l'échelle nationale. Les prix se stabiliseront d'ici la fin de l'année et resteront stables en 2010.

Au Québec, le Mouvement Desjardins prévoit que «la baisse des prix qui était initialement anticipée n'aura pas lieu». Les prix n'ont fait qu'une pause et on déjà commencé à remonter. La hausse s'élève déjà à 2,6% entre janvier et juillet et Desjardins prévoit qu'elle atteindra 3% pour l'ensemble de l'année. Desjardins croit qu'elle pourrait excéder 5% en 2010.

Une vigueur surprenante

Qu'est-ce qui fait ainsi mentir les boules de cristal? «Les taux d'intérêt ont diminué et les gens ont commencé à croire que le gros de la récession était derrière. Ça a propulsé la confiance des consommateurs et fait monter les ventes», analyse M. Klump, qui mentionne aussi que les importantes baisses de prix dans plusieurs régions du Canada ont incité bien des consommateurs à sauter sur les aubaines.

Hélène Bégin, de Desjardins, avoue quant à elle trouver étrange de voir le marché immobilier si vigoureux alors que les pertes d'emplois ne sont pas terminées (37 000 pertes au Québec pour le seul mois de juillet) et que le taux de chômage trône à 9%.

«Habituellement, quand il y a des pertes d'emplois importantes, la consommation et le marché immobilier continuent de battre de l'aile. On se disait que même si la confiance des consommateurs revenait, il faudrait que le secteur emploi soit bon pour qu'on voie un redressement dans l'immobilier. Dans ce cas-ci, ça s'est avéré non-nécessaire et c'est assez curieux. On dirait que le ressac a été vraiment occasionné par le côté psychologique de la crise.»