Le président américain Barack Obama a annoncé hier un plan de 75 milliards visant à contenir les saisies de maisons qui aggravent la crise du marché de l'habitation à l'origine de la récession actuelle. La rapidité et l'ampleur de son succès restent déterminantes pour la relance des exportations canadiennes de matériaux de construction.

Le plan cherche à obtenir le maximum d'impact avec une enveloppe somme toute modeste, compte tenu de la taille du marché hypothécaire fragilisé (10 000 milliards environ). C'est néanmoins 25 milliards de plus que ce que le secrétaire au Trésor Tim Geithner avait annoncé la semaine dernière.

 

Le plan s'adresse aux propriétaires dont la valeur de leur résidence est inférieure à celle de leur prêt hypothécaire garanti ou titrisé par Freddie Mac ou Fannie Mae, deux entités mises en tutelle en septembre et dont les assises financières sont aussi renforcées. Jusqu'à 9 millions d'Américains pourront en profiter.

Washington incite les prêteurs à réduire les paiements hypothécaires des emprunteurs à 38% de leurs revenus. Pour chaque prêt modifié, le prêteur recevra de l'État 1000$ par année durant trois ans, si le prêt est honoré. Washington compensera aussi le prêteur, s'il ramène les paiements à 31% du revenu des emprunteurs.

Ces derniers ne sont pas en reste. L'État leur versera 1000$ au cours des cinq prochaines années, s'ils honorent leurs mensualités. Cet argent servira à la réduction de leur prêt.

«Cela donnera à des millions de familles acculées à la ruine financière une chance de se reconstruire, a expliqué le président. En abaissant le taux de saisies, on va consolider le prix des maisons pour tous et chacun.»

«Ce nouveau plan est beaucoup plus dynamique que l'initiative ratée de l'an dernier Hope for Homeowners (De l'espoir pour les proprios) qui n'incitait pas les prêteurs à renégocier, souligne Sal Guatieri, économiste principal chez BMO Marchés des capitaux. Comment le plan sera monté et à quelle vitesse reste la question clé sans réponse.»

«C'est sûr que 75 milliards vont faire leur chemin, mais ils auront plus d'impact s'ils ne sont pas disséminés, prévient toutefois Mo Chaudhury, professeur de pratique financière à la chaire de gestion Desautels de l'Université McGill. Il faut dépenser l'argent là où son impact sera maximum.»

M. Chaudhury note que la crise de l'habitation ne frappe pas tous les États américains avec la même violence.

À plat

Chose certaine, l'industrie de la construction résidentielle est vraiment à plat: seulement 466 000 mises en chantier le mois dernier, en chiffres annualisés, une chute de 17% sur les données de décembre.

En données réelles, c'est à peine 39 000 unités, le nombre le plus faible depuis 1959, année où la compilation a commencé. Depuis le sommet de 2006, il s'agit d'une correction sans précédent de 79% des mises en chantier.

Plusieurs observateurs y voient cependant un signe de plus que la crise a enfin atteint son paroxysme. Le nombre de permis de bâtir a reculé de 4,8% en janvier pour se fixer à 521 000 unités sur une base annualisée. L'écart avec les mises en chantier est le plus élevé depuis décembre 2007. Le nombre de permis pour le segment logements multiples était même légèrement à la hausse.

Il y a plus. La somme des unités sur le marché de la revente et des mises en chantier donne 4,1 millions, «le niveau le plus faible depuis 2003», font observer Yannick Desnoyers et Pierre Lapointe de la Financière Banque Nationale.

Ils soulignent aussi que la relance du marché immobilier survient en moyenne six mois avant que le marché du travail connaisse ses pires pertes.

Faut-il voir un autre présage que la relance n'est pas loin dans le fait que le nombre de demandes de prêts hypothécaires avait bondi de 46% la semaine dernière?

Si la relance s'avère prochaine, le Québec, qui est un grand producteur de bois d'oeuvre et de matériaux de construction de toutes sortes, depuis les armoires jusqu'aux bardeaux, les briques et les portes et fenêtres, pourra en tirer partie. Surtout que le huard paraît bien installé autour des 80 cents US d'équivalence.

En 2007, la valeur des exportations du Québec s'élevait à près de 70 milliards, dont plus de 52 aux États-Unis. Les produits du bois (papier exclu) représentaient près de deux milliards. La résolution du long litige commercial canado-américain sur le bois d'oeuvre permettra peut-être enfin à cette industrie à se relever, si la construction résidentielle redémarre enfin au Sud.

Elle devrait alors une fière chandelle à Barack Obama.

 

Les points saillants du plan pour l'immobilier

279 milliards US

Le président Barack Obama a promis 279 milliards US pour réduire les paiements hypothécaires des propriétaires en difficulté.

9 millions de familles

Le plan devrait permettre à de 7 à 9 millions de familles d'échapper à la vague de saisies qui a précipité la crise et contaminé le reste de l'économie américaine.

200 milliards US

Le Trésor américain rachètera jusqu'à 200 milliards US des prêteurs hypothécaires Fannie Mae et Freddie Mac, soit deux fois plus que prévu, pour freiner les saisies de maisons.

75 milliards US

Washington avancera jusqu'à 75 milliards US aux institutions financières qui accordent des réductions de paiements hypothécaires aux propriétaires (à un maximum de 31% de leur revenu). Quatre millions de personnes pourraient être aidées.