RHST Industries, une petite entreprise de Pointe-Claire, a l'ambition de s'imposer comme le prochain Monsanto de l'agriculture organique avec sa technologie unique qui permet de mieux irriguer les sols et de réduire de 50 à 80 % la consommation d'eau en agriculture traditionnelle tout en augmentant de 20 à 30 % la croissance des plantes, sans utilisation de fertilisants.

Toutes ces vertus sont contenues dans la technologie des perles d'eau qu'a mis 20 ans à développer Thomas Gradek, Montréalais et ingénieur de formation. Il a mis au point une molécule hydrophobe qui permet d'enrayer l'évaporation de l'eau dans les sols et de conserver l'humidité tout autour de la zone racinaire des plantes ou des arbres fruitiers.

Avant de fonder RHST Industries, Thomas Gradek a oeuvré durant une quinzaine d'années dans le domaine de l'import-export avec les pays de l'ex-bloc de l'Est.

« J'ai vu à l'époque ce que les effets de la famine ou de la malnutrition pouvaient avoir sur de larges populations et j'ai voulu trouver des façons d'augmenter la production alimentaire de façon saine », m'explique l'ingénieur, que j'ai rencontré lors de la récente mission économique québécoise en Chine.

Durant ce séjour en Chine, RHST Industries a signé des ententes importantes avec deux groupes chinois intéressés à importer sa technologie de perles d'eau.

Une première entente, évaluée à 20 millions de dollars, avec le groupe Beijing Construction Engineering Group prévoit un partenariat de 18 mois durant lequel RHST Industries va fournir sa technologie et ses services-conseil au groupe chinois.

Si les résultats sont concluants, cette entente pourrait s'étendre sur une période de cinq ans et totaliser des revenus de 100 millions pour RHST Industries qui devra embaucher 50 personnes additionnelles à ses installations de Pointe-Claire.

Un second partenariat a été conclu avec la société chinoise Kingpen, qui est le plus gros exploitant de serres hydroponiques en Chine et qui veut utiliser la technologie de RHST pour assurer le traitement des eaux de ses installations et en assurer la commercialisation dans une quarantaine de pays.

Cette entente pourrait se traduire par une hausse très importante de la production de perles d'eau de RHST Industries, totaliser jusqu'à 300 millions de revenus en cinq ans et créer 50 emplois additionnels à Pointe-Claire.

DES PERLES AUX USAGES MULTIPLES

Les perles d'eau ont l'apparence de billes bleues et ont la propriété d'enrayer l'évaporation de l'eau et de mieux drainer le précieux liquide vers les zones racinaires de plantations.

« Il s'agit d'une molécule inerte et réutilisable qui garde l'humidité du sol dans la zone racinaire. [Les perles d'eau] réduisent la taille des racines, mais augmentent de 20 à 30 % le volume de la plante ou de l'arbre fruitier qu'elles protègent tout en empêchant la formation de bactéries et donc des mauvaises herbes en surface.

« En culture hydroponique, elles permettent de réduire de 30 à 40 % la consommation d'eau et d'empêcher la formation d'algues ou de bactéries tout en facilitant la transpiration des plantes. Elles permettent d'éviter l'utilisation de systèmes de filtration complexes, parce qu'elles protègent l'eau », souligne Thomas Gradek.

Ces molécules hydrophobes permettent de mieux cibler le drainage des sols et de réduire considérablement l'apport d'eau.

« Quand tu sais qu'il faut 19 000 litres d'eau pour produire un kilo de café, c'est énorme. Imaginez quelle quantité d'eau potable cela représente pour un pays comme l'Éthiopie qui produit 3 millions de kilos de café par année.

« En Iran, 92 % de l'eau potable est absorbée par l'agriculture. On peut réduire de façon importante cette empreinte hydrique en utilisant mieux la ressource », insiste Thomas Gradek.

UN INTÉRÊT MONDIAL

Ce n'est qu'en 2016 que RHST a entamé la production de ses perles d'eau, dont le développement s'est fait en collaboration avec le Collège Macdonald et l'Université McGill.

Cette production a servi essentiellement à réaliser des tests dans toutes sortes de conditions en Afrique du Sud, dans les Caraïbes, dans les Émirats arabes unis et même dans le désert de Jordanie, où un ancien professeur de McGill a réussi à faire pousser des vignes dans un sol sablonneux.

« On a démontré l'efficacité de notre technologie de perles d'eau et on entreprend maintenant sa commercialisation. »

« On a fait une percée en Chine et on s'en va maintenant en Afrique du Sud où on va participer à la culture en pépinière pour la production d'agrumes : citrons, oranges, pamplemousses et limes. »

- Thomas Gradek

« On est en train de faire une percée en Californie, où notre technologie de perles d'eau va être très utile pour la culture de la vigne. On entreprend aussi des pourparlers avec l'Inde, où les besoins alimentaires et la rareté de la ressource hydraulique sont bien connus », expose Thomas Gradek.

L'entreprise de Pointe-Claire, qui ne compte pour l'instant que sur une quinzaine d'employés et une seule machine qui fabrique sa précieuse molécule, est appelée à prendre de l'expansion dans les prochains mois alors qu'elle va augmenter ses capacités de production pour répondre à la demande mondiale.

« On vient tout juste de recevoir une lettre d'intention de la société chinoise Aerospace Kaitian Environmental Technology qui veut faire des essais avec nos molécules pour ses expériences d'agriculture dans la station spatiale.

« Plutôt que d'utiliser de la terre stérilisée qui augmente la charge utile à transporter, ils veulent cultiver dans du papier humide protégé par notre molécule. On va participer à cette expérience », souligne avec contentement Thomas Gradek.

La technologie de la perle d'eau sera bientôt littéralement en orbite.

Photo André Pichette, La Presse

Thomas Gradek, président de RHST Industries

Photo André Pichette, La Presse

Les molécules hydrophobes des pillules permettent de mieux cibler le drainage des sols et de réduire considérablement l'apport d'eau.