Nommé à la tête d'eOne Films Canada il y a deux semaines, Patrick Roy entend bien profiter de sa nouvelle position au sein du plus important distributeur de films indépendant au Canada pour assurer un plus grand rayonnement international à nos réalisateurs québécois qui font déjà leur marque à l'étranger.

L'ex-PDG d'Alliance, société canadienne de distribution de films qui a fusionné avec Atlantis avant d'être rachetée au début des années 2000 par la firme financière Goldman Sachs, s'est joint au groupe Entertainment One en 2013.

En janvier 2013, l'entrepreneur canadien et fondateur d'eOne Films, Darren Thorpe, a mis la main sur Alliance Viva Films pour fusionner ses activités avec sa division canadienne Films Seville.

«Nos deux entités faisaient essentiellement le même travail, mais on était aussi compétiteurs. Il fallait rationaliser nos opérations et bâtir la meilleure équipe qui soit.

«En gros, Alliance distribuait au Canada et à l'étranger quelque 70 films par année, et Films Seville en faisait une cinquantaine. Aujourd'hui, on distribue au Québec entre 90 et 100 films par année et, de ce nombre, on en distribue une quinzaine qui sont produits au Québec et tout autant qui sont produits au Canada», explique Patrick Roy.

En succédant à Bryan Gliserman comme PDG d'eOne Films Canada, Patrick Roy entend bien sûr mettre à profit sa grande connaissance du milieu du cinéma québécois pour mieux faire rayonner notre cinématographie dans le reste du pays - et évidemment faire l'inverse -, mais il compte aussi maximiser la nouvelle force du groupe canadien pour donner davantage de possibilités à nos réalisateurs de talent de produire des oeuvres destinées au marché international.

Plus qu'un simple distributeur 

C'est qu'eOne Films Canada est une division au sein d'une entité dont la somme des parties déborde largement la simple distribution de films au Canada.

Au fil des ans, le fondateur d'eOne Films, Darren Thorpe, a tissé un réseau de distribution indépendant qui a pris racine dans plusieurs marchés prépondérants.

Il existe un eOne aux États-Unis, un autre en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Angleterre, en Espagne et au Benelux, ainsi qu'un eOne International.

L'entreprise est inscrite à la Bourse de Londres et réalise un chiffre d'affaires annuel de 1,3 milliard. Il existe aussi une division musique, mais l'essentiel des revenus est généré par les activités de distribution de films.

«Nos activités dans le cinéma et la télévision ne se limitent plus à la seule distribution. On a réalisé récemment l'acquisition aux États-Unis de Mark Gordon Productions. C'est sa boîte qui a notamment coproduit le film Saving Private Ryan et la télésérie à succès Grey's Anatomy.

«Cette acquisition va nous permettre de financer des scénarios de films à grand budget, destinés à un marché international, pour nos réalisateurs de talent comme Denis Villeneuve, Jean-Marc Vallée ou Xavier Dolan. C'est une autre porte qui s'ouvre pour eux», souhaite Patrick Roy.

L'entreprise indépendante du secteur du divertissement ne dévoile pas ses résultats par régions, mais Patrick Roy consent à nous dire que dans la distribution de films, les divisions eOne Films du Canada et de l'Angleterre constituent les deux plus importants générateurs de revenus du groupe international.

«On se bat contre et avec les majors. Au Canada et en Angleterre, on est troisièmes, derrière de grands joueurs qui profitent d'une clause de protection de marché. Mais on est bons premiers comme distributeur indépendant. Au Québec, on se classe premiers, devant les majors», précise-t-il.

La vie au-delà de l'écran

Ce n'est pas par simple charité chrétienne que Patrick Roy affiche la volonté de faire éclater à l'international la carrière des réalisateurs québécois de talent.

La société eOne réalise plus de 25% de ses revenus totaux de box-office de ses activités de distribution de films à l'international. Ce qui inclut les revenus des films qu'elle achète de l'étranger pour les diffuser dans les marchés où elle est présente, mais aussi ceux des films québécois et canadiens qu'elle exporte à l'international.

«Si on ne distribue pas les films des majors au Canada, on a des ententes de distribution exclusives avec des gros joueurs indépendants tels que Weinstein, Focus, Relativity, Lions Gate, Summit ou CBS dans tous les marchés où on est présents», précise le distributeur.

Patrick Roy compte bien assurer la présidence d'eOne Films Canada à partir de ses bureaux montréalais de la rue Saint-Antoine, mais il prévoit tout de même se présenter chaque semaine aux bureaux torontois de la maison mère.

«J'ai la chance de pouvoir compter sur une équipe solide à Montréal. Notre métier est basé sur une relation de confiance avec tous les intervenants de l'industrie.

«Quand on accepte de prendre la distribution d'un film, non seulement on s'assure de sa viabilité au box-office, mais aussi on s'occupe de tous les revenus périphériques auxquels on peut penser: télédistribution, DVD, visionnements en vidéo. Les propriétaires de salles sont importants, mais il faut penser à la vie après la diffusion sur grand écran», précise Patrick Roy.

À ce sujet, le PDG d'eOne Films Canada souligne la grande responsabilité qui repose sur les épaules de son groupe.

«On est le premier oeil du scénario d'un film. Au Canada, pour qu'un cinéaste obtienne son financement des organismes publics, il doit d'abord obtenir la garantie qu'un distributeur va en assurer la diffusion. Habituellement, un film sur trois que l'on appuie va obtenir son financement à sa première demande.

«Sinon, quand on est derrière un scénario, cela finit par arriver à la deuxième ou troisième demande. On peut dire qu'on a un taux de succès de pas loin de 100%», indique le PDG, qui espère obtenir le même taux de réussite dans la démarche internationale de nos cinéastes.