Mine de rien, à force de patientes acquisitions ciblées et d'une volonté sans cesse réaffirmée de vouloir consolider le marché, Uni-Sélect est en train de s'imposer aux États-Unis comme un joueur majeur du secteur de la distribution de pièces automobiles, un secteur qui de tout temps était la chasse gardée des entreprises américaines.    

Richard Roy, le président d'Uni-Sélect est revenu hier de Las Vegas où il a assisté durant toute la semaine à un congrès des manufacturiers et distributeurs de pièces automobiles. Ce n'était pas le premier périple en sol américain qu'il faisait cette année et ce ne sera surtout pas son dernier.

C'est que depuis 2004, les États-Unis sont devenus le principal terrain de jeu de ce distributeur de pièces automobiles destinées au marché de remplacement. C'est de là qu'est maintenant tiré l'essentiel de la croissance d'Uni-Select qui vient d'y réaliser ses plus importantes acquisitions.

Fondée en 1968 par 12 grossistes québécois de pièces automobiles qui ont regroupé leur pouvoir d'achat, Uni-Select est devenue une société publique en 1985, aux beaux jours du Régime d'épargne actions. L'entreprise avait alors réalisé un modeste financement de trois millions pour assurer son expansion canadienne.

Fait à noter, les actions d'Uni-Select émises à l'époque à 75 cents en valent aujourd'hui 26$. C'est donc dire qu'un investisseur qui aurait investi 1000$ au moment de la première émission d'actions serait plus riche aujourd'hui de 34 000$. Pas mal, pour un distributeur de pièces d'autos. Ça donne le goût de conduire une voiture neuve...

Le virage américain

Uni-Select achète des pièces d'automobiles directement de plusieurs dizaines de manufacturiers qu'il revend à des grossistes indépendants. Au Canada, l'entreprise dispose de12 immenses entrepôts et de 12 magasins corporatifs qui desservent 600 grossistes indépendants et 1 000 magasins.

«Au Canada, on a passablement consolidé le marché des grossistes indépendants. C'est pourquoi en 1998, deux mois avant que je me joigne à Uni-Select comme vice-président Finances, on a fait une première percée aux États-Unis où on a acheté un distributeur, au centre du pays», relate Richard Roy.

«On a pris une participation de 50% d'une entreprise qui réalisait des ventes annuelles de 60 millions. L'année d'après, on acheté un autre distributeur dans le Tennessee qui réalisait des ventes de 50 M$.

«Mais c'est en 2004 qu'on a donné un grand coup en achetant le distributeur Middle Atlantic qui avait un réseau de magasins dans le Nord-Est et au Texas. Nos ventes américaines sont passées de 110 millions à 440 millions à l'époque», résume celui qui occupe le poste de PDG d'Uni-Select depuis le 1er janvier 2008.

L'aventure américaine s'est toutefois transformée en destin américain lorsque Uni-Select a complété l'acquisition en début d'année de la société Finish Master, le plus important distributeur indépendant de produits de peinture pour automobiles.

«Ç'a été une grosse acquisition qui nous a permis de mettre la main sur un leader qui distribue d'un océan à l'autre les grandes marques nationales de produits de peintures pour autos.

«Une transaction qui a ajouté 420 millions à nos revenus annuels et qui a contribué à hausser notre profitabilité dès la première année», insiste Richard Roy.

Enfin, Uni-Select a poursuivi sa consolidation patiente du marché américain en complétant la semaine dernière une autre acquisition, celle de Parts Depot, en Floride. L'entreprise québécoise s'est bonifiée de trois nouveaux entrepôts, 39 magasins corporatifs et 75 clients grossistes qui gonfleront de 87 millions ses revenus annuels.

Uni-Select possède maintenant 28 entrepôts géants aux États-Unis, 400 magasins corporatifs et 1500 grossistes indépendants qui desservent 3300 magasins.

«On réalise maintenant 71% de notre chiffre d'affaires de 1,3 milliards aux États-Unis. Dans 10 ans, ce sera 90% de nos revenus qui vont provenir des États-Unis, parce que c'est là que la croissance se trouve.

«On va y arriver en réalisant chaque année une transaction qui va rajouter 100 millions en revenus, comme celle que l'on vient de conclure en Floride», explique Richard Roy.

Un ADN de logistique

Avec les ans, Uni-Select a développé une expertise de pointe bien à elle dans la gestion d'inventaires et de livraison.

«L'organisation et la vente à des grossistes, c'est notre ADN. On a développé des outils pour améliorer nos services et atteindre l'excellence opérationnelle. On vient de mettre en opération un système de prévision de la demande et un nouveau système de gestion interne», expose Richard Roy.

Uni-Select a plus de 350 000 pièces en inventaire, dans ses entrepôts. Mais elle peut livrer jusqu'à 1,8 million de produits différents, selon la demande de ses clients.

«Il faut qu'on soit en mesure de livrer les pièces aux garagistes dans un délai de 30 minutes au maximum. À toutes les nuits, des camions quittent nos entrepôts et assurent l'approvisionnement de nos grossistes-membres. C'est sans fin», constate Richard Roy.

La situation économique difficile aux États-Unis n'inquiète pas outre mesure le PDG qui identifie deux facteurs de ralentissement de ses opérations: l'augmentation des prix du pétrole et le taux de chômage élevé persistant.

«Quand tu n'as pas d'emploi, tu vas moins loin en voiture. Les autos s'usent moins, mais par ailleurs l'âge avancé du parc automobile nous favorise.»

La décision la plus marquante

C'est la décision d'aller à fond sur le marché américain, en 2004, qui a été la décision stratégique la plus importante qui a été prise par Uni-Select, estime son PDG Richard Roy.

Il était chef de la direction financière, lorsque l'occasion s'est présentée de faire l'acquisition de Middle Atlantic, une entreprise qui ressemblait à Uni-Select.

«On les regardait depuis les années 90. L'entreprise était détenue par monsieur Buzzard et ses enfants. Il nous a bien étudiés et il a vu qu'on était là pour faire croître leur entreprise. Il a même tenu à acheter 1 million d'actions d'Uni-Select», explique Richard Roy.

«Cette transaction a démontré qu'on était aux États-Unis pour y rester. On n'était pas des touristes. Ç'a été notre «foot print». Et c'est ce qui a permis d'accélérer notre croissance aux États-Unis.»