La valeur des actions de Molson Coors (T.TPX.B) a bondi à de nouveaux sommets historiques hier, propulsée par la spéculation entourant une nouvelle vague de consolidation dans le marché de la bière.

Le titre s'est apprécié de 8% à un certain moment au cours de la première séance de la semaine pour finalement clôturer en hausse de 6%, à 76$US, à la Bourse de New York, avec un volume de transactions 10 fois plus important qu'à l'habitude.

Les investisseurs réagissaient à la publication, dimanche soir, d'un communiqué de Heineken qui confirmait une dépêche de Bloomberg dans laquelle il était mentionné que le brasseur néerlandais venait de repousser une offre de rachat de son concurrent britannique SABMiller.

Il n'en fallait pas plus pour que la machine à rumeurs s'emballe.

«Maintenant que Heineken (contrôlé par des intérêts familiaux) vient de s'auto-exclure, SAB pourrait regarder ailleurs et nous continuons de croire que Molson Coors serait la meilleure cible pour SAB», commente Sanjeet Aujla, de la firme Credit Suisse, dans un rapport de recherche signé avec six de ses collègues analystes.

«Des synergies d'environ 1 milliard de dollars (10% des ventes nord-américaines) pourraient être générées en combinant les activités nord-américaines. Le portefeuille de produits de SAB serait plus fort au Canada et aux États-Unis. Ça pourrait aussi servir de pilule empoisonnée contre une éventuelle offre d'Anheuser-Busch InBev», disent les experts de Credit Suisse.

Le Wall Street Journal indiquait justement hier que la direction de Anheuser-Busch InBev discutait avec des banquiers de la possibilité d'obtenir un financement qui pourrait s'élever à 122 milliards US pour préparer une éventuelle offre pour SABMiller.

Molson Coors fait aussi partie d'un tel scénario, selon les analystes de Credit Suisse. Molson Coors serait l'acquéreur naturel de la participation de SAB dans la coentreprise formée il y a sept ans entre SABMiller et Molson Coors sur le marché américain. La vente de la participation de SAB dans cette coentreprise deviendrait essentielle afin de satisfaire les autorités réglementaires aux États-Unis.

L'analyste Mark Swartzberg, de la firme Stifel, croit lui aussi que Molson Coors serait l'acquéreur le plus probable de la participation dans la coentreprise.

Rien n'assure cependant que les rumeurs se confirmeront. «Une transaction entre Heineken et SABMiller est improbable et une fusion d'Anheuser-Busch InBev avec SABMiller serait beaucoup trop onéreuse étant donné le cours actuel de SABMiller par rapport à son évaluation historique», dit April Scee, analyste chez BTIG.

«Et une prime serait exigée pour SABMiller ce qui rend une acquisition par Anheuser-Busch moins attrayante.»

L'action de SABMiller a clôturé en hausse de près de 10% hier à la Bourse de Londres.

Rebondissements en vue

Des rebondissements sont à prévoir, car April Scee croit que SABMiller devait fortement se douter que Heineken allait lui dire non. «La famille (Heineken) a toujours dit qu'elle voulait conserver une participation significative dans l'entreprise, ce que SABMiller sera incapable et réticent à offrir.»

Pourquoi avoir tenté un rapprochement alors? Peut-être pour se protéger d'une possible offre d'Anheuser-Busch, selon Bloomberg.

Anheuser-Busch InBev, SABMiller et Molson Coors contrôlent ensemble plus de 90% du marché américain de la bière. Une fusion d'Anheuser-Busch InBev avec SABMiller, les deux plus gros brasseurs au monde, placerait plus de 90% du marché américain sous la férule de deux entreprises. Le nouveau géant contrôlerait par ailleurs environ le tiers de la production mondiale.

En 1990, les 10 plus gros brasseurs accaparaient 22% de la production mondiale. Aujourd'hui, environ 50% de la production mondiale se trouve entre les mains de quatre principaux acteurs (voir tableau).

Molson Coors compte un peu plus de 9300 employés, dont 2600 au Canada (près de la moitié de ce nombre est à Montréal). Officiellement, l'entreprise a deux sièges sociaux: Denver et Montréal.

L'action de Molson Coors montre une progression de près de 40% en Bourse depuis le début de l'année. Le titre de Molson Coors est recommandé par 5 des 11 analystes qui s'y intéressent.

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QUATRE GRANDS BRASSEURS 

Nom - Siège social - Part de la production mondiale - Principales marques

Anheuser-Busch - InBev - Belgique - 20% - Budweiser, Beck's, Stella Artois

SABMiller - Angleterre - 10% - Miller, Grolsh, Milwaukee's Best

Heineken - Pays-Bas - 9% - Heineken, Amstel, Sol

Carlsberg - Danemark - 6% - Carlsberg, Kronenberg, Tuborg

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SABMILLER AU FIL DES ANS

> 2002: Fusion de SAB (South African Breweries) avec Miller

> 2005: Achat de Bavaria

> 2007: Achat de Grolsh

> 2007: Coentreprise avec Molson Coors aux États-Unis

> 2011: Achat de Foster's