Entre deux défilés, au Festival Mode & Design cet été et à la Semaine Mode Montréal (ce soir à l'Arsenal), Judith Desjardins prépare son retour aux États-Unis.

À 15 ans, après de petits revers, sa griffe Bodybag by Jude a une belle maturité pour franchir à nouveau la frontière et se faire voir ailleurs que dans sa boutique de la rue Bernard, à Montréal. «Je veux retourner doucement aux États-Unis, explique Judith Desjardins. Avec la collection printemps-été 2014, on va tâter le terrain. J'ai refait ma liste d'anciens clients potentiellement intéressés. Je veux vraiment prendre mon temps, être dans les bonnes boutiques et non vendre pour vendre. Si je peux avoir huit rendez-vous à New York cet automne, je vais être satisfaite.»

En attendant d'engager l'agent idéal pour représenter Bodybag by Jude chez les voisins américains, Judith Desjardins ira elle-même dévoiler ses robes, jupes et vestons aux coupes géométriques singulières. «Il y a la valeur du travail du designer à transmettre, dit-elle. En présentant les collections moi-même, je raconte l'histoire de chaque morceau. Si j'en étais capable, je ferais tout, mais j'ai eu une fille il y a un an et demi.»

Judith Desjardins remplira très bientôt ses sacs avec le désir de faire gonfler le pourcentage américain du chiffre d'affaires de l'entreprise au-delà des 40% d'autrefois, à l'époque où les vêtements Bodybag by Jude étaient disséminés dans une trentaine de points de vente à New York, Boston, Miami, dans l'Illinois et le Texas.

«À moyen terme, on aimerait que ce soit 50-50, mentionne-t-elle. À mes débuts, je vendais beaucoup aux États-Unis. Mais en 2005, avec l'ouverture des marchés, les quotas d'exportation ont été abolis. Les plus grandes compagnies ont envahi le marché du streetwear et du clubwear pour le même prix ou moins cher.»

Et puis, il y a eu les départs simultanés de ses assistantes au développement des ventes et au design qui ont plombé le déploiement de la marque. «Tu pleures ta vie... cinq minutes! Pas plus, lance Judith Desjardins. J'ai arrêté de participer à des salons professionnels, par manque d'effectifs, mais j'ai mis les bouchées doubles. Et je me suis enfin décidée à ouvrir la boutique que je rêvais d'avoir.»

Depuis 2006, les ventes, alors de près de 50 000$, ont grimpé constamment de 30% jusqu'à l'an dernier où elles ont fléchi de 15%. «Aujourd'hui, la concurrence est plus forte, constate Judith Desjardins. Avant, je n'avais pas à vivre avec les H&M, Zara et Forever 21. Cette fois, pour grandir, je compte miser sur la qualité et la réputation du made inCanada.»

L'instinct d'abord

Aujourd'hui, Bodybag by Jude compte huit employés à temps plein et à temps partiel. Judith Desjardins caresse le rêve d'ouvrir une deuxième et peut-être même une troisième boutique au nom de sa griffe, qui signifie housse mortuaire en français.

«J'attends d'être épatée par un local, avoue la designer. C'est peut-être pour ça que je ne suis pas millionnaire! I go with the flow! Je fonctionne beaucoup par instinct et coups de coeur.»

Mais d'autres vecteurs de croissance se profilent. Cet hiver, Judith Desjardins dessinera les uniformes des pilotes et agents de bord de la compagnie aérienne DAC Aviation. «J'ai toujours eu un faible pour les uniformes! avoue-t-elle. Et ça pourra être significatif sur le chiffre d'affaires de l'entreprise.»