Si l'Halloween est la grande fête des friandises, chez Chocolats Andrée, elle symbolise davantage le début de la dernière ligne droite avant une période folle. Six semaines intenses de production, de commandes, d'emballage et de distribution de chocolats.

Comme d'autres boutiques de produits fins et adresses de gâteries assumées, Chocolats Andrée accueille chaque fois la venue du Christ (ou du père Noël, c'est selon!) dans un tourbillon. Car après Pâques, Noël est la période à la production la plus élevée pour la vénérable entreprise du Mile End. «C'est le quart de notre chiffre d'affaires, précise la propriétaire, Stéphanie Saint-Denis. Tout est rempli dans l'arrière-boutique.»

Les travaux de canalisation sur l'avenue du Parc, où s'érige le triplex qu'occupe Chocolats Andrée depuis 71 ans, ont fait hésiter plusieurs clients à franchir les portes du petit commerce. Depuis que Stéphanie Saint-Denis, petite-fille de la cofondatrice Madeleine Daigneault (aujourd'hui à la retraite), a pris les rênes du commerce en 2007, le chiffre d'affaires a crû de 15% en 2008, de 12% en 2009, avant de retomber au niveau de 2007... pour cause de rue éventrée, de grues imposantes et cônes orangés omniprésents. «L'an dernier, à Noël, au moins 20% des ventes ont été réalisées par l'entremise de notre site internet et au téléphone», note toutefois Stéphanie Saint-Denis.

En devenant propriétaire de Chocolats Andrée (qui compte six employés, dont certains y sont depuis 30 ans), Stéphanie Saint-Denis a mis un pied dans le passé et un autre dans l'avenir. Tout changer en arrivant? «Je me suis posé la question, avoue-t-elle. Mais on a nos recettes intemporelles, classiques. La guimauve et le caramel, j'aime ça. Ça me ramène au temps où je faisais mes devoirs sur les tables en marbre du commerce. On a quelque chose qui fonctionne et on a fait nos preuves.»

Cela dit, elle ne peut compter que sur la longévité de l'entreprise pour assurer des ventes - près de quatre tonnes de chocolats par an - ni voir passer le train des médias sociaux sans sauter dedans. «On a d'autres défis importants à relever, dit-elle. L'internet et les médias sociaux nous amènent tellement de possibilités. Je suis à la fois stressée et excitée par ça. Comment répondre aux commandes internet, alors que j'aime être au point de vente?»

Chocolats Andrée, à la page web on ne peut plus simple, investit désormais 5% de son chiffre d'affaires, environ 10 000$, en communications ou opérations marketing. «L'an dernier, on a envoyé des communiqués de presse, chose qu'on n'avait jamais faite avant, raconte Stéphanie Saint-Denis. Aussi, comme on n'est jamais mieux représenté que par les produits, je m'arrange pour les faire goûter. On place des chocolats sur les tables dans le cadre d'événements et de mariages. Je veux faire connaître ce qu'on fait, notre méthode de travail unique [chocolats saucés à la main], nous remettre sur la carte gourmande de Montréal. La majorité de notre chiffre d'affaires se fait de décembre à mai [65% ]. Il faut donc créer des partenariats avec les organisateurs d'événements spéciaux pour combler le reste de l'année.»

Si elle n'est pas entrée dans le commerce de sa grand-mère avec un bulldozer, Stéphanie Saint-Denis a toutefois jugé nécessaire d'augmenter le prix de la boîte de chocolats, pour suivre l'augmentation du coût des matières premières et des emballages. Elle a jugé intéressant aussi d'ajouter une friandise de plus aux 45 saveurs vendues chez Chocolats Andrée. Un geste qui a fait bondir grand-maman. «J'ai introduit les suçons d'Halloween au chocolat noir, lance Stéphanie Saint-Denis fièrement. Ma grand-mère était fâchée. Ça partait mal! Je lui ai alors dit: s'il en reste, je vais tous les manger! Eh bien! les 100 suçons se sont vendus.»

Puis, quelques semaines plus tard, la propriétaire a encore vu du feu dans les yeux de grand-maman lorsqu'elle a installé au comptoir des suçons en forme de sapin de Noël. «Elle m'a dit que c'était du temps requis supplémentaire pour les employés de les faire, se rappelle la comptable agréée de profession. Ce qui n'est pas le cas. Mais à Pâques, avec les suçons en lapin, ça a changé. Maintenant, elle prend plaisir à les regarder. Elle a avoué que ça faisait joli dans le présentoir. Elle s'est rendu compte que ça fonctionnait.»