La bataille pour le contrôle des yaourts Yoplait a rebondi jeudi: la marque à la petite fleur a rejeté l'offre d'achat du groupe Lactalis, qui n'entend pas renoncer et se dit prêt à négocier, en continuant de jouer la carte de la solution française.

Au lendemain de la proposition inattendue de 1,4 milliard d'euros (1,94 millards de dollars CAN) du numéro trois mondial des produits laitiers, le fonds d'investissement français PAI et la coopérative laitière Sodiaal ont dit «non» à son offre.

 

«La structure proposée par Lactalis ne répond pas à la volonté de Sodiaal de demeurer un actionnaire stable et pérenne de Yoplait», argumentent-ils. En outre, «le prix proposé (...) ne reflète ni la valeur intrinsèque et stratégique de Yoplait, ni ses perspectives de croissance».

PAI et Sodiaal détiennent chacun la moitié du capital de Yoplait.

Les deux actionnaires préféreraient un actionnaire étranger pour aider à l'expansion de Yoplait dans les marchés émergents, selon la presse.

Lactalis, qui exploite les marques Président, Lactel, Société..., n'a pas tardé à réagir. Le groupe de la famille Besnier s'est dit prêt à négocier avec les deux actionnaires actuel de Yoplait.

«Il y a certainement des négociations possibles. Nous allons négocier», a fait savoir un de ses porte-parole, contacté par l'AFP, sans toutefois dire si le groupe entendait relever son offre.

Lactalis est déjà présent dans les yaourts depuis qu'il a pris le contrôle de la marque La Laitière au groupe Nestlé. Avec l'apport de Yoplait, il deviendrait un rival de poids pour le leader français Danone.

En lançant son offensive avant même que les enchères ne soient officiellement ouvertes, Lactalis espère bénéficier du soutien du gouvernement, inquiet de la perte de compétitivité de la filière laitière française.

«C'est un projet industriel plein d'avenir visant à maintenir Yoplait dans le patrimoine national», a répété jeudi Lactalis, qui emploie quelque 38 700 salariés et réalise environ 8,5 milliards d'euros (11,8 milliards CAN) de ventes annuelles.

Une façon aussi de court-circuiter les groupes suisse Nestlé et américain General Mills, tous deux étrangers et repreneurs possibles.

L'agroalimentaire est souvent présenté comme «stratégique» en France. En 2005, l'État s'était mobilisé pour éviter un éventuel rachat de Danone par le groupe américain de boissons sans alcool Pepsico.

Mais pour contrer cette stratégie de «barrage patriotique», le fonds PAI, qui souhaitait que Sodiaal vende également ses parts pour maximiser le prix de cession, a accepté que son partenaire reste au capital.

Sodiaal, qui regroupe environ 9000 producteurs de lait, va ainsi demeurer «un actionnaire stable, pérenne et important» de Yoplait.

D'après le quotidien Financial Times, les deux partenaires font le pari que si la coopérative laitière ne vendait pas sa participation, le gouvernement français serait plus réceptif à l'arrivée d'un actionnaire étranger.

Les relations complexes et difficiles entre Lactalis et Sodiaal pourraient toutefois constituer un autre obstacle aux ambitions du premier. Ils sont directement concurrents dans le lait en bouteille (Lactel contre Candia) ou encore dans le camembert (Président contre Coeur de Lion).

Le groupe industriel et la coopérative sont aussi opposés dans la manière adéquate de fixer le prix du lait, au centre de nombreux mouvements de protestation des agriculteurs au cours des derniers mois.

Yoplait a généré environ 3,5 milliards d'euros (4,85 milliards CAN) de chiffre d'affaires en 2010, grâce aux franchisés, notamment aux États-Unis, où il est le numéro un des produits laitiers frais.