La récession américaine a permis à Gildan (T.GIL) de développer d'autres marchés. Mais pour continuer à croître en Asie, le fabricant de vêtements et de bas veut y construire une méga-usine dans un avenir rapproché.

Quand Glenn Chamandy parle de méga-usine, le suffixe méga n'est pas de trop: 20 000 personnes y seront employées. «L'Asie fait partie de notre stratégie de croissance, explique le président et chef de la direction en entrevue à La Presse Affaires, en marge de l'assemblée des actionnaires. Pour avoir un approvisionnement plus efficace, nous devons avoir, comme au Honduras, des installations majeures.»

Or, en Amérique du Sud et dans les Caraïbes, Vêtements de sport Gildan inc. emploie quelque 20 000 personnes. Ses sous-traitants, eux, en font travailler 6000 autres dans la région.

Vous voulez donc en embaucher autant en Asie? a-t-on demandé. «Ben oui, c'est ça («Oh! ya, for sure!»)» a-t-il répondu sur le même ton que d'autres utilisent pour dire qu'ils vont acheter un Pepsi au dépanneur du coin. L'investissement pourrait avoisiner les 300 millions, si on prend comme point de référence les coûts de construction au Honduras.

Le calendrier n'est pas encore clair. Mais le dossier progresse suffisamment pour que le grand patron en parle publiquement et énumère les critères qui lui feront choisir sa destination. Déjà, la Chine - devenue chère par rapport à des voisins comme le Vietnam - est écartée.

Le coût de la main-d'oeuvre est le premier critère cité par M. Chamandy, mais il n'est pas le seul. Le pays choisi devra pouvoir fournir une source d'énergie à bas coût et, élément intéressant, avoir des ententes de libre-échange avec ses voisins.

Gildan a mandaté la firme Deloitte & Touche pour estimer la taille du marché du chandail chinois. Les chiffres sont impressionnants.

Pour le seul vêtement imprimé, les ventes totalisent 80 millions de douzaines. Un marché de 1,6 milliard US, soit plus que le chiffre d'affaires annuel de Gildan. Tous vêtements confondus, le chiffre est de 500 millions de douzaines, confie M. Chamandy. «C'est gros. Ils sont 1,4 milliard de personnes en Chine...»

La récession américaine

Cette ouverture à d'autres marchés est possible, étrangement, grâce à la récession aux États-Unis. «Depuis 1998, on avait toujours écoulé tout ce qu'on produisait», explique-t-il encore. Les inventaires d'invendus, c'est un concept que Gildan ne connaissait pas.

Le marché a toutefois changé à l'automne 2008. En octobre, les ventes ont piqué du nez de 25%, les acheteurs cessant leurs emplettes face à ce consommateur américain devenu hésitant, voire complètement inactif. Gildan embauche alors «6 ou 7 personnes» et se met à écouler ses stocks sur d'autres marchés. En même temps, l'entreprise entre dans le secteur du détail, notamment en signant des ententes avec Wal-Mart.

Gildan espère maintenant croître dans ces secteurs, comme l'entreprise l'a fait dans les ventes aux distributeurs. «On ne s'attend pas à ce que le marché (de ventes aux distributeurs) revienne», souligne-t-il encore. Ses prévisions de croissance de 17% du chiffre d'affaires pour l'année en cours tiennent donc pour acquis que l'entreprise augmentera ses parts de marché et non que les consommateurs achèteront davantage.

Hier, après la publication de résultats dépassant les attentes la veille, l'action de Gildan a pris 1,26$ à la Bourse de Toronto, à 25,18$, en hausse de plus de 5%.

200 morts en Haïti

Le chiffre est tombé hier pendant l'assemblée des actionnaires: un des sous-traitants de Gildan en Haïti a perdu la trace de 200 de ses 1400 employés après que son usine s'est écroulée le 12 janvier. «On pense qu'une grande proportion d'entre eux sont morts», a confié M. Chamandy après l'assemblée.

Un service commémoratif aura lieu demain.

En chiffres

500 millions

Nombre de chandails vendus par Gildan l'an dernier.

57,3%

Part de marché de Gildan sur le marché nord-américain des t-shirts à la fin 2009.

100 millions US

Liquidités que Gildan détenait à la fin du dernier exercice.

spaquet@lapresse.ca