Pour avoir une idée du comportement de l'action de Suncor Energy, vous faites bien de jeter un coup d'oeil à la valeur du baril de pétrole. C'est logique. Pour Saputo, regardez du côté du bloc de cheddar de 40 livres vendu à la Bourse de Chicago.

Évidemment, on parle moins du prix de la meule de fromage que de celui de l'or noir. N'empêche, depuis juillet, la valeur du cheddar a grimpé de plus de 60% en Bourse, pour atteindre ces jours-ci 1,70$ US la livre.

«C'est certainement bon pour eux», explique l'analyste Brian Yarbough, de la firme Edward Jones&Co., à St. Louis, au Missouri, en parlant de Saputo. Ces prix plus élevés aident le fromager montréalais à deux niveaux, explique-t-il.

D'abord, comme ses fromageries fonctionnent avec certains coûts fixes, des fromages plus chers à la Bourse de Chicago lui permettent d'augmenter ses marges. Logique.

Ensuite, Saputo possède lui-même des stocks de fromage, dont la valeur est mise à jour quand Saputo publie ses résultats.

À la fin du trimestre terminé le 30 septembre, Saputo a indiqué que le prix moyen du fromage pendant la période était de 1,23$ US. À la fin du trimestre, il avait déjà atteint 1,41$ US. Le 1,70$ US actuel donne donc à Saputo une marge supplémentaire que les investisseurs ont déjà anticipée. Le titre a atteint un sommet de 31,02$ le premier décembre.

Hier, il a toutefois reculé de 15 cents à 30,20$, dans un marché hésitant. Cette baisse est survenue alors que des rumeurs voulant que le groupe ait offert d'acheter une fromagerie australienne ont atteint le marché. Saputo continue à se dire intéressé par l'Australie, mais refuse de dire s'il est sur les rangs pour acquérir Warrnambool Cheese&Butter. Warrnambool a rejeté une offre non sollicitée et jugée trop faible, sans préciser de qui elle venait.

Après les Fêtes?

Mais revenons au prix du cheddar. La question que plusieurs se posent sur le marché est la suivante: après une année fort volatile, le prix du cheddar plongera-t-il après les Fêtes comme il l'a fait l'an dernier? «C'est comme jouer à pile ou face», confie M. Yarbrough, qui estime toutefois que la volatilité sera moindre dans les prochains mois.

En novembre, en dévoilant ses résultats financiers, Lino Saputo a indiqué que «jusqu'aux Fêtes, nous nous attendons à ce que la demande continue de se raffermir, mais elle est beaucoup plus faible que ce que nous avons vu l'an dernier». Saputo n'a pas voulu faire de commentaires dans le cadre de cet article.

L'analyste James Durran, de la Financière Banque Nationale, a écrit le mois dernier que trois facteurs jouaient en faveur de prix du fromage plus élevés aux États-Unis. D'abord, le nombre de vaches laitières diminue au sud. Ensuite, les prix des produits laitiers sur la planète sont généralement élevés. Et, finalement, la demande, tant aux États-Unis qu'ailleurs, est en hausse.

Pour ces raisons, écrit M. Durran. «si les prix (du fromage) devaient subir une pression, ce serait dans le quatrième trimestre de Saputo (de janvier à mars) pendant lequel la demande saisonnière est basse et ce serait de courte durée».

En attendant, Saputo espère sans doute que les Américains gratinent leurs choux-fleurs et continuent à manger de la pizza avec un «extra fromage».