Cascades (T.CAS) a largement profité de l'effondrement des prix des matières recyclables, l'automne dernier, mais espère désormais que le marché continuera de se redresser afin d'éviter que les citoyens ne cessent de récupérer.

En raison notamment d'une chute drastique de la demande asiatique, les prix des fibres recyclées ont frappé un creux historique, l'automne dernier. La situation était telle que des centres de tri québécois ont cessé de vendre leurs matières, préférant les accumuler dans l'attente de jours meilleurs.

Depuis, les prix ont remonté pour atteindre environ les deux tiers de leur moyenne historique, a indiqué lundi le président et chef de la direction de Cascades, Alain Lemaire, à l'issue d'un discours prononcé devant le Cercle canadien de Montréal.

Pour Cascades, la crise a été bénéfique à deux niveaux: l'entreprise a non seulement profité des bas prix pour augmenter ses réserves de matières recyclables, mais elle a aussi sauté sur l'occasion pour améliorer sa position concurrentielle.

Cascades a ainsi conclu des ententes d'approvisionnement avec des fournisseurs locaux, y compris des chaînes de grands magasins, qui trouvaient plus intéressant, jusque-là, de vendre leurs matières récupérées à des exportateurs. L'entreprise de Kingsey Falls a également acquis quelques petits récupérateurs canadiens.

«On a rapproché notre approvisionnement de nos usines en signant avec des entreprises qui étaient plus locales, ce qui nous a permis de réduire nos coûts de transport», a expliqué M. Lemaire.

Au plus fort de la crise, la baisse des prix des matières récupérées s'est traduite par un effet positif de 10 à 15 millions de dollars par trimestre pour Cascades. Avec la remontée des prix, cet impact est en bonne partie disparu, mais Alain Lemaire ne s'en plaint pas trop.

«Fondamentalement, ce n'est pas bon, a-t-il affirmé. (...) S'il n'y a pas un équilibre économique dans ça, les gens arrêtent de récupérer, de recycler et ça, c'est très néfaste pour l'industrie. Avant que les gens reprennent l'habitude de récupérer comme avant, ça va peut-être prendre deux ans.»

Cascades est l'un des pionniers du recyclage. Chaque année, l'entreprise transforme 2,2 millions de tonnes de fibres recyclées. Pas moins de 80 pour cent de ses produits, que ce soit du carton, du papier ou du papier tissu, en contiennent.

Carton plat

Les dirigeants poursuivent par ailleurs leur réflexion au sujet de l'avenir de la division du carton plat, qui sert à fabriquer des boîtes de produits de consommation courante comme des boîtes de céréales. Le secteur donne du fil à retordre à Cascades depuis 10 ans.

Malgré la récente amélioration des résultats de la division, Alain Lemaire n'exclut toujours pas de s'en départir si la situation devait se dégrader à nouveau.

D'une marge bénéficiaire d'exploitation négative de cinq pour cent l'an dernier, la division est passée à une marge positive d'environ cinq pour cent au plus récent trimestre terminé. L'objectif est d'atteindre 10 pour cent d'ici un an. L'été dernier, Cascades a fermé une usine de carton plat à Toronto, ce qui a fait perdre leur emploi à 140 personnes.

«Si cette performance de redressement continue, ça va nous aider à garder la division dans notre giron, mais si on ne réussit pas à faire mieux dans les six prochains mois ou un an, on devra prendre la décision de s'en départir», a lâché M. Lemaire.

Ce serait une décision déchirante à prendre: la division procure le tiers des revenus annuels totaux de Cascades, soit 1,3 milliard  sur 4 milliards. Et si l'on décidait de vendre, encore faudrait-il trouver un acheteur, ce qui n'est pas évident par les temps qui courent.

«C'est en remettant les usines à flot que tu peux plus facilement trouver un acheteur, a souligné le PDG. (...) Mais quand elles sont devenues profitables, tu te dis «pourquoi est-ce que je les vendrais maintenant que ça contribue à la rentabilité de l'entreprise?» Ca va être notre dilemme à ce moment-là, mais ce n'est pas pour demain. On va donc continuer de les remettre sur pied et si ça continue comme ça, on n'aura pas à les vendre.»

Quant à la remontée récente du huard, elle nuira un peu aux résultats de Cascades, qui exporte environ 20 pour cent de sa production canadienne aux Etats-Unis.

Les répercussions sont toutefois moindres qu'il y a deux ou trois ans, alors que chaque cent d'augmentation de la valeur du dollar canadien face au billet vert coûtait entre 7 et 8 millions à Cascades. Aujourd'hui, grâce à un repositionnement des ventes et des actifs, il en coûte entre 4 et 5 millions par cent.

«C'est moins dommageable pour l'entreprise que ça l'était auparavant», s'est réjoui Alain Lemaire.

L'action de Cascades a clôturé lundi à 5 dollars, en baisse de deux pour cent, à la Bourse de Toronto.